L'Eglise adventiste canadienne et l'affaire Karla Homolka. Ce que l'on peut déduire (03.06.2017)

Karla Homolka, Eglise adventiste du septième jourDepuis le 31 mai dernier, Karla Homalka a occupé de nouveau le devant de scène médiatique canadienne suite aux révélations de City News indiquant qu'elle est bénévole dans un établissement scolaire adventiste. Ancienne complice du tueur en série Paul Bernardo, son mari. Allias Ken et Barbi, le couple est pour les canadiens des amoureux meurtriers, anges de la mort. La justice canadienne a condamné Karla pour complicité de séquestrations, de viols et meurtres de deux adolescentes. Victime de violences conjugales elle a collaboré avec la police et permis l’arrestation de Paul Bernardo. Cette affaire a suscité au Canada le même émoi que l’affaire Dutroux en Belgique. Dans ces deux pays, ces faits-divers ont entraîné le débat sur le retour de la peine de mort. Une fois sa peine purgée, Karla dont les expertises psychiatriques avaient mis en évidence « un état psychique dégradé ». Entre 2007 et 2012 elle disparaît et les médias canadiens mènent une véritable chasse. C’est la La journaliste d’investigation Paula Todd qui la trouve et révèle dans son livre Finding Karka que Karla Homalka vie dans la région de Chateaugay sous le nom de Léanne Bordelais du nom de son nouveau mari, Thierry Bordelais, le frère de son avocat.

Karla Homolka, Eglise adventiste du septième jourTout le Canada est indigné par la possibilité faite à l’ex détenue complice de meurtres d’être en contact avec des jeunes. Les parents d’élèves montrent leur indignation et ne veulent plus qu’elle soit en contact avec la société scolaire. L’Église adventiste qui a accueilli Homalka se trouve sous le feu de la critique. Dans un communiqué, elle indique prendre acte du tumulte. Elle met fin aux activités bénévole de Karla. Désormais, souligne le communiqué, face aux exigences des parents, l’absence de casier judiciaire pour les bénévoles sera un impératif. La SDA rajoute dans son communiqué, l’ancienneté et l’étendu de son implication dans l’Education au Canada et dans le monde afin de permettre aux canadiens de bien ramener à sa juste proportion ce fait-divers.

Loin des critiques qui depuis 3 jours pleuvent sur l’Église adventiste du septième jour, jugée trop laxiste pour laisser une ex meurtrière en contact avec des enfants, l’affaire montre le paradoxe dans lequel nos sociétés placent le religieux.
Karla a purgé sa peine. Dans un cadre démocratique, l’idée est que sa peine soit un tremplin vers la réinsertion. L’aversion causée par ses crimes font qu’elle rencontre uniquement le rejet, ce qui peut se comprendre si on se met à la place des parents d'élèves. A contrario, l’obligation, la nécessité d’un accompagnement social demeure. Les groupes religieux, comme l’Église adventiste du septième jour, chrétienne et protestante, place au centre ses croyances la notion de Pardon et d’accompagnement. Par défaut, face au rejet de l’ensemble de la société, ces organisations sont les seules à prendre le relais d’un Etat qui devrait accompagner les ex détenus. Lorsque les organisations religieuses font donc cette mission normalement dévolue à l’État, elles sont, comme le montre ce fait-divers vilipendées.
Que comprendre ? Le religieux est souvent utilisé au travers de ses structures sociales et scolaire comme une variable d’ajustement des limites de l’État. En se défaussant sur elle, l’État ne prend aucun risque et se félicite du rôle des organisations religieuses. Mais on ne peut demander à ces organisations de renier leur ADN qu’est le Pardon, l’accompagnement sociaux éducatif et sanitaire. Elles prennent évidemment dans le cas de Karla des risques. Cela est une dimension intégrante de ce que j’appelle l’éthique de responsabilité, c’est-à-dire cette conviction des groupes religieux qu’ils sont responsables du salut des congénères et doivent donc agir en ce sens. C’est ce qu’a fait l’Église adventiste canadienne en acceptant d’inscrire les enfants de Karla dans son établissement et en consonance, de laisser celle-ci participer de manière limité à la vie d’établissement.

Nos sociétés sont des espaces de relations paradoxales avec le religieux. L’affaire Karla Homalka et les reproches faites l’Église adventiste acculée à devoir mettre fin au bénévolat d’une ex meurtrière illustre ce paradoxe qui n’est en rien nouveau. C’est peut être un élément de définition de la place du religieux dans les sociétés sécularisés.

16:21 Écrit par fades | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook