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LES ADVENTISTES ET LA SANTE(de J.L Chandler)

381db0dce121823a3a49c5ff1976ea9a.jpgLa présente note a été réalisée par l'historien Jean Luc Chandler, spécialiste de l'adventisme dans la Caraïbe (qu'il me pardonne l'illustration réalisée par mes soins dans ma cuisine!). Désormais, ce dernier fera plusieurs contributions sur le blog. L'avantage est évidemment les précisions des historiens dont nous ne pouvons faire l'économie. Ce sera donc un repère incontournable pour saisir la densité du mouvement adventiste. Mes remerciements à Jean Luc Chandler pour le temps et l'énergie que demande la réalisation de notes. De plus, la première que vous allez lire est particulièrement, complète, détaillée. Tout ce qu'il faut pour une bonne pédagogie. Merci Jean Luc pour cette première et vite, vite la suite de cette présentation du lien entre adventisme et santé.

Genèse théologique
 

Les adventistes du septième jour ont une vision holistique quadridimensionelle. En termes plus simples, ils considèrent l’être humain comme un tout indissociable. Ils lient étroitement ses quatre facultés (physique, mentale, sociale et spirituelle) et parlent de bien gérer quatre aspects de sa vie (le corps, le temps, les talents et les biens). Les adventistes ont puisé cette notion naturellement dans la pensée hébraïque biblique. 1 Thessaloniciens 5.23 est l’un des textes qui viennent le plus souvent à l’esprit :

« Que le Dieu de paix vous rende lui-même entièrement saints et qu’il vous garde parfaitement esprit (ruah), âme (psuché) et corps (soma) pour que vous soyez irréprochables lors de la venue de notre Seigneur Jésus-Christ. »    

 
Selon ce texte, une personne dans son intégralité, c’est à dire sur le plan de toutes ses facultés - spirituelle (ruah), psychique (psuché) et corporelle (soma) -, est appelée à se préparer au retour du Christ.Cette compréhension adventiste de l’être humain contraste clairement avec trois conceptions de la pensée grecque.

  1. Le premier concept marque une dichotomie entre le corps (qui serait mauvais) et l’esprit (qui serait bon).
  2. Le deuxième concept spécule qu’après la mort, l’âme immortelle quitte le corps, son enveloppe mortelle.
  3. Le troisième concept découle des deux premiers en produisant deux modes de vie extrêmes et opposés : l’ascétisme (le mépris du corps) et l’hédonisme (la licence corporelle).

 Il faut bien saisir cette différence de notion sur la nature humaine afin de comprendre pourquoi les adventistes s’intéresseront autant à la santé. Au cours de leurs recherches, certains millérites notèrent que la séparation du corps et de l’âme, ainsi que l’immortalité de l’âme, étaient des idées étrangères à la Bible. Ils appuyèrent cette notion à partir de l’Ancien Testament, où l’âme désigne l’être tout entier, notamment dans Genèse 2.7 :

« L’Eternel Dieu façonna l’homme avec de la poussière du sol, il lui insuffla dans les narines le souffle de vie, et l’homme devint un être (nephesh) vivant. »

Le mot nephesh signifie « âme » ou « être », son sens équivalent. Selon la définition biblique, la poussière de la terre + le souffle de vie = une âme vivante. Et donc inversément, la poussière de la terre – le souffle de vie = une âme morte (Psaume 104.29, Ecclésiaste 3.20-21). Toutes les facultés de l’homme fonctionnent ou s’éteignent conjointement. L’immortalité est conditionnelle, puisqu’elle promise à ceux qui suivent le plan divin pour leur salut.
Les millérites « conditionalistes » ne firent pas un lien direct entre leur découverte et la santé. La nature humaine holistique était seulement pour eux une doctrine correcte. Néanmoins, deux décennies plus tard, les adventistes du septième jour, un groupe relativement insignifiant au départ dans la nébuleuse millérite post-1844, affineront cette compréhension et en tireront toutes les conséquences sur le plan pratique.

 

Un temps d’ignorance

L’intérêt des adventistes pour la santé ne fut pas immédiat. Il faut dire qu’ils avaient d’autres sujets de préoccupation. Entre 1845 et 1848, leur attention fut retenue par une étude intense de la Bible et par la dé-couverte de plusieurs doctrines majeures. Puis entre 1850 et 1863, James White mena une campagne longue et acharnée, tentant de les convaincre de s’organiser en Eglise. Ainsi on peut déjà remarquer, avant d’aller plus loin dans cet exposé historique, que la santé ne constitue pas le centre, ni n’est l’un des « pilliers », de la plateforme doctrinale adventiste.
En 1848, Ellen White parla bien de la nocivité du tabac, du café et du thé anglais et vers 1853, l’hebdomadaire Advent Review and Sabbath Herald (appelé aujourd’hui Adventist Review, « la revue adventiste »), commença à s’opposer à leur usage mais ces appels passèrent  largement inaperçus. La plupart des adventistes demeurèrent peu pratiquants de principes de santé encore incompris. Le seul dirigeant adventiste connu pour son attachement aux principes de la tempérance était le doyen, Joseph Bates, qui, à 72 ans en 1863, jouissait toujours d’une bonne santé. Mais il resta discret sur ses points de vue. Quand on lui demandait pourquoi il ne consommait pas de viande, il répondait simplement : « J’en ai mangé pour mon compte ».
C’était un temps de grande ignorance médicale. Les médecins prescrivaient aux malades des drogues fortes en grandes quantités, des poisons comme l’arsenic, l’opium, la quinine et le mercure. L’alcool était conseillé en cas de fièvre pour « accroître la vitalité » du patient. Dans le cas contraire d’un « excès de vitalité », la saignée était considérée comme le nec plus ultra des traitements.
Les habitudes de santé laissaient beaucoup à désirer. Les gens prenaient rarement un bain. Les repas étaient très épicés. Sans moyens modernes de conservation, une famille consommait en quelques jours toute la viande d’un animal tué, fut-ce un boeuf. Les desserts se composaient de gâteaux richement garnis de crêmes. La plupart des gens évitaient les fruits et les légumes, surtout pour les enfants, les soupçonnant d’avoir été la cause de l’épidémie de choléra en 1832. L’espérance moyenne de vie des Américains était réduite : 32 ans en 1800, 41 ans en 1850.
Malades, plusieurs leaders adventistes se trouvèrent devant un urgent besoin de réforme sanitaire. Quand John Loughborough commença à prêcher à l’âge de 18 ans, on lui conseilla le tabac pour soigner une maladie des poumons. Croyant que c’était un bon conseil, il prit l’habitude de fumer des cigares. On attribuait communément des vertus médicinales au tabac. Son menu était fort copieux : porc grillé au petit-déjeuner, viande bouillie au déjeuner, jambon et boeuf au dîner. En 1863, à 34 ans, John Andrews, le théologien du mouvement, fut frappé d’une congestion cérébrale et d’une dyspepsie nerveuse. Il avoua plus tard : « Je ne connaissais presque rien des méfaits d’une nourriture malsaine ».
La famille White fut elle-même durement frappée par la maladie. En septembre 1860, John Herbert, le dernier des quatre garçons, s’éteignit à l’âge de trois mois. En août 1863, James White, à 42 ans, eut une attaque de paralysie qui faillit lui coûter très cher. Un véritable bourreau de travail, il ne tempérait pas son activité furieuse. Son mot d’ordre était : « Mieux vaut s’user que rouiller ». Quand sa femme le suppliait de ralentir, de prendre du repos, de ne pas embrasser le travail de trois ou quatre personnes, il répondait invariablement : « Où sont les hommes pour tout ce qu’il y a faire ? ». Pour couronner le tout, en décembre 1863, Henry, le fils aîné, mourut d’une pneumonie à l’âge de 16 ans.

 

Une révolution sanitaire

Le 5 juin 1863, une douzaine de jours après l’organisation de la Conférence Générale de l’Eglise adventiste (il y avait 3500 adventistes à l’époque), Ellen White reçut une vision importante de 45 minutes sur les principes de la santé. Alors qu’elle était restée relativement en retrait dans la recherche et la formulation des doctrines adventistes - Joseph Bates, James White, Uriah Smith ou John Andrews jouèrent un rôle plus essentiel -, elle deviendra la principale instigatrice du mode de vie adventiste.
Pour soigner son mari, Ellen chercha un centre de soins où l’on pratiquait les principes qu’elle avait vue en vision. Cinq semaines après sa congestion, James rentra en convalescence dans l’établissement de Dr. James Jackson, à Dansville dans l’état de New-York. Jackson était un novateur dans le traitement et l’enseignement de la santé, notamment par l’emploi de l’hydrothérapie, une méthode de soins découverte en 1777 par Dr. William Wright, un médeçin de la Jamaïque.
Cette découverte vaut bien de faire un petit détour historique. En se rendant par bateau en Angleterre, Wright attrapa le typhus. Les médicaments n’apportèrent aucun soulagement mais en montant sur le pont, il s’aperçut que plus l’air était froid, mieux il se sentait. Ceci l’incita à tenter une expérience. Sur son corps nu, il fit verser trois seaux d’eau froide de mer. Il renouvela l’expérience plusieurs fois pendant trois jours et la fièvre disparut complètement.
Pour son traitement, Dr. Jackson utilisa des bains chauds, des compresses froides et une diète essentiellement liquide. James White retrouva l’usage de sa main paralysée mais son rétablissement ne fut pas miraculeux. De retour au foyer à Battle Creek dans le Michigan, Ellen l’encouragea à faire de l’exercice - contre son gré - comme elle l’avait vue en vision. Avec du repos, de l’exercice, une meilleure nutrition et un allègement de ses responsabilités, la santé de James s’améliora progressivement.
Déterminée à mettre en pratique les principes de « la réforme sanitaire » (comme on appela ce mode de vie), Ellen White changea ses habitudes alimentaires. Ce ne fut pas facile pour une grosse mangeuse de viande ! Il fallut huit mois de discipline persévérante. Répondant favorablement à ses appels, les dirigeants adventistes lancèrent la publication du « The Health Reformer » (Le réformateur de la santé), le premier magazine adventiste sur la santé, en août 1866. Dr. Horatio Lay fut le rédacteur en chef.
Le mois suivant, les adventistes démarrèrent « l’institut de la réforme sanitaire » dans l’ancienne résidence d’un juge de Battle Creek. Le personnel fut composé de Dr. Horatio Lay et Dr. Phoebe Lamson (qui avaient étudié la médecine à Dansville), d’une infirmière et de trois ou quatre aides. Le succès de l’institut fut immédiat. Deux mois plus tard, il fallut louer des chambres dans le voisinage pour acceuillir les patients accourus de neuf états des Etats-Unis et du Canada. Lay se mit rapidement à envisager la construction d’un hôpital.
Les adventistes se lancèrent dans une vaste campagne de promotion et de formation des principes de la santé. Ils s’inspirèrent des idées novatrices de quelques réformateurs non adventistes de la santé, notamment Dr. Sylvester Graham, Dr. I. Coles et Dr. James Jackson. Sylvester Graham conseilla particulièrement :

  1. La consommation des fruits, des légumes et du pain complet.
  2. Le remplacement du beurre par de la crème.
  3. L’abstinence de la viande, du poisson, des sauces, des condiments, du tabac, des stimulants comme l’alcool, le café et le thé anglais.
  4. Une lente mastication des aliments.
  5. Une grande consommation d’eau pure.
  6. L’abstinence d’aliments entre les repas et éviter de trop manger.
  7. Environ sept heures de sommeil dans une chambre bien ventilée.
  8. Un bain quotidien d’eau chaude ou froide.
  9. Un repas léger au souper, trois à quatre heures avant le coucher.

 

On voit clairement des similarités ici avec l’enseignement d’Ellen White sur la santé, notamment en rapport avec les fameux huit principes énoncés dans le best-seller « Le ministère de la guérison » :

« L’air pur, la lumière du soleil, la tempérance, le repos, l’exercice, la bonne nutrition, l’eau et la confiance dans la puissance divine : tels sont les vrais remèdes ».

Ellen White encouragea les adventistes à réformer leur mode de vie. Elle préconisa une alimentation ovo-lacto-végétarienne. Néanmoins, les adventistes tolérèrent l’usage des viandes « propres à la consommation » selon les instructions de Lévitique 11. La réforme sanitaire devait s’opérer progressivement, résolument mais avec douceur.

 

Une réforme salutaire

Les adventistes adoptèrent et ressentirent assez rapidement les bienfaits de leur nouveau mode de vie. Pourtant, cette adhésion fut loin d’être évidente au départ. La viande était la principale source de subsistance des fermiers de la Nouvelle Angleterre. On n’avait aucune raison de penser que les huit principes englobaient les lois de la santé. La science n’avait pas encore découvert les cellules, les microbes, les molécules ou les toxines. Elle ne savait rien des méfaits du mauvais cholestérol, du sucre, de la nicotine ou de la caféine. Elle ne connaissait pas les bienfaits des fibres, des vitamines ou de l’aérobie.
Une raison théologique explique pourquoi la réforme s’imposa. Comme nous l’avons souligné, les adventistes ont considéré l’être humain comme un tout indissociable. Ce qui affectait une capacité se répercutait sur les autres capacités. Par exemple, l’alcool pouvait endommager les facultés corporelles d’un individu, altérer ses facultés mentales, aliéner ses relations sociales et empêcher sa relation spirituelle avec Dieu.
Les adventistes ont noté l’existence de principes et de lois sur la santé dans la Bible. Ils ont lu que le corps était « un temple du Saint-Esprit », qu’il fallait en prendre soin et honorer Dieu de cette manière. Ils ont vu  les misères et les fléaux liés à la maladie. Ils ont conclu qu’elle était une anomalie, un dérèglement, une violation des lois de la santé. Ils ont remarqué que Jésus passa plus de temps à guérir les malades qu’à enseigner. Dieu souhaitait notre bonheur et notre épanouissement. Sa volonté était qu’on soit en bonne santé (3 Jean 2).
Les adventistes se mirent à étudier la médecine, la biologie, la nutrition et les autres sciences pour mieux comprendre les lois de la santé. Ces recherches les amenèrent à voir la santé comme étant le fruit d’un processus. C’était un mode de vie. De ce fait, leur philosophie de la santé a été préventive plutôt que curative. Pour autant, ils développeront un système médical d’envergure à travers le monde. Pourquoi et comment s’y sont-ils pris ? Nous examinerons cette question la prochaine fois.

 

Commentaires

  • Bonjour,

    Article très intéressant mais qui fait (peut-être) un peu trop la part belle aux visions d'Ellen White.

    Ma question est la suivante : pourquoi cet historique ne fait-il aucune mention du Dr Kellog ? Son influence est-elle considérée comme secondaire ? Ou bien est-ce par parti pris adventiste que de nier l'implication et surtout l'influence de ce docteur aux USA concernant le diététisme ?

    Béatrice

  • Patience ! La prochaine note historique parlera de la contribution monumentale du Dr. Kellog.

  • Correction.
    Par inadvertance, je me suis mélangé les pinceaux avec les langues bibliques dans le texte (grec) de 1 Thessaloniciens 5.23. Pour le mot "esprit", il fallait lire le mot grec "pneuma" au lieu du mot hébreu "ruah" qui signifie aussi la même chose. Mille excuses.

  • Quels sont les recent commentaire sur les états de mort.(surtout ceux qui soutiennent l'immortalité de l'ame). selon les rapports de nos differents chercheurs, et selon les differentes confessions surtout les confessions non Chrétiennes.
    s.v.p faite les données de plus au moins trois cheurcheurs.

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