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Rechercher : religion de la santé

  • L'Eglise Adventiste participe au plan Bush contre le SIDA en Ouganda

    Dans une récente note sur son blog Sébastien Fath met en exergue les erreurs du regard de l’administration Bush sur le religieux. Il note que le président américain ne maîtrise pas l’histoire religieuse de son pays et a une vision erronée du rapport de Lincoln au religieux, alors qu’il prétend s’inspirer de ce dernier. Reprenant un récent article critique du Washington post, Fath met en évidence ces deux manquements de G. Bush Junior tout en notant que le président américain surfait sur la réhabilitation dans la société américaine des valeurs (religieuses) conservatrices. C’est sur ce premier point que note Fath, que je vous propose de glisser. Plus précisément, regardons une illustration de la politique de santé et de développement économique des pays pauvres de la Maison Blanche à partir d’une dépêche de l’AFP passée anonymement.

  • Les adventistes et la santé '2): L'apport du Dr John Harvey Kellogg, par Jean Luc Chandler

    02829c5cf0688cdcc39f35af4ae68d10.jpgEn 1863, la situation est mûre pour une réforme du mode de vie des adventistes du septième jour. Ils ont découvert des doctrines bibliques majeures et ils se sont organisés en Eglise. Libérés de ces préoccupations, ils peuvent prêter l’oreille quand Ellen White lance la « réforme sanitaire », d’autant plus facilement que les Etats-Unis (l’Europe dans une mesure moindre) traversent une crise de la santé. Comme c’est souvent le cas, Ellen White lance l’initiative, présente les lignes directrices et guide les adventistes mais les dirigeants de l’Eglise et les professionnels de la santé se chargent de faire des recherches et de mettre en oeuvre la grande réforme. On y reviendra...

  • Pratique soignante et judiciarisation

    Lieu: IFSI de Sens, mardi 5 janvier 2010.

    Public: Etudiants, professionnels de santé

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    Les professionnels de santé sont de plus en plus exposés à des risques juridiques. Mais qu’est-ce qui explique ce changement ? Que dénote la judiciarisation sur les attentes sociales vis-à-vis des soignants ? Comment intégrer cette évolution dans la relation au patient ? Peut-on en faire un atout, un outil de communication opérant pour une plus grande confiance dans la relation entre praticien et patient ? L’intervention visera à montrer que la judiciarisation est un trait de la modernité et n’est pas spécifique au médical. Cependant il a des effets bien particuliers. Les caractéristiques des sciences médicales dans la modernité ne sont d’ailleurs pas étrangères à ce changement dont elles se plaignent. Une fois ce constat dressé, il convient de noter, que l’ingéniosité communicationnelle consiste à retourner cette évolution au profit de la relation avec le patient ? Il ne s’agit de tisser un simple échange qui vise à protéger juridiquement le patient mais à construction une véritable confiance partenariat dont le patient et le praticien sortent gagnants.


     

     

  • Le covid-19 impose aussi au religieux un questionnement majeur

    L'ensemble des grandes fêtes religieuses est remodélée en raison du Covid-19. Pâques pour les chrétiens, Pessah chez les juifs, et le Ramadan vont devoir se vivre dans une expression privée malgré leur dimension familiale, communautaire. Pourtant toutes ses fêtes sont avant tout des moments communautaires. Plus largement le coronavirus impacte l'ensemble des relations dans notre société. C'est aussi le cas pour le religieux qui a été chronologiquement la première institution sociale touchée en France via le rassemblement protestant de l'Eglise de la Porte Ouverte à Mulhouse le 17 février. L'histoire retiendra que le protestantisme a été "un amplificateur" de la pandémie en France. Cela aurait pu être un concert, un rassemblement sportif, un meeting politique! Mais que ce soit par cette chronologie malheureuse de l'épidémie et plus globalement sur les changements imposés dans les rapports sociaux, les groupes religieux, comme l'ensemble de la société, doivent faire face à un avant et un après covid-19. Il faut pour cela se rendre compte des questionnements, des problématiques que le coronavirus renvoie aux groupes religieux.

    • Le rapport à l’Etat et la notion de contrôle.

    Les grands rassemblements de La Porte Ouverte sont libres, gratuits et sans inscription. Ils rappellent ceux des réveils religieux protestants libéraux où, des entrepreneurs moraux pouvaient avoir beaucoup de succès au pont de devenir parfois des réformateurs. Ils sont en ce sens en droite ligne avec le volet libéral du protestantisme qui considère que les faibles contraintes facilitent la propagation, l’acceptation du message divin. La liberté garantie une relation volontaire et durable avec le divin.
    Les conséquences organisationnelles de cette vision ont vite été source de critiques avec la pandémie mondiale du Covid-19. En effet, les autorités ne disposaient pas d’une liste complète des individus qui étaient au rassemblement de Mulhouse lorsqu’il fallut réaliser une enquête épidémiologique et identifier chacun des éventuels individus infectés.
    Bien qu’il soit distendu, on peut donc déjà retenir que pour certains groupes protestants, il est nécessaire de revoir certains points d’organisation pour mieux répondre aux exigences de l’Etat en acceptant de construire un lien plus fort avec les autorités, au prix de revoir, de refonder les conséquences organisationnelles, politiques d’une vision libérale du religieux.
    L’Etat qui est souvent conçu comme un facteur de limitation à l’expression religieuse, voire un agent hostile, doit être repensé pour une vision plus constructive.
    Théologiquement cela déstabilise des visions binaires où l’Etat est lu dans une sémantique de la parousie où, surtout pour les groupes millénaristes messianiques, Il (l’Etat) a un rôle très négatif vis-à-vis du religieux. (Je rappelle que l'expression de millénariste messianique renvoie aux groupes qui croient en la parousie autour d'un messie qui apporterait le paradis dans une chronologie singulière. Voir ce que j'en dis ici)

     

    • Quelle image restera-t-il ?

    20135250lpw-20136284-article-jpg_6963631_660x281.jpgTous les historiens font un constat qui fait froid dans le dos : les pandémies ont toujours été le terreau très fertile des fantasmes les plus négatifs sur les groupes sociaux exposés à la stigmatisation. Les juifs, les étrangers, les groupes religieux minoritaires, les défavorisés… deviennent rapidement des pestiférés. Le terme n’est d’ailleurs pas neutre puisqu’il signifie grande calamité et est passé dans le langage avec les pandémies de peste. J’ai d’ailleurs, en ne restant pas dans le champ médical parlé de psycho oncogénèse lors des grandes pandémies mais aussi vis-à-vis des groupes religieux.
    Avec le rassemblement de Mulhouse, malgré elle, l’Eglise de La Porte Ouverte aurait-elle réavivé les préjugés antireligieux. Ses pasteurs racontent les diatribes voire plus, dont ils sont la cible sur les réseaux sociaux alors qu’ils sont les premières et importantes victimes du virus. Le religieux, singulièrement protestant ici est perçu comme la porte d’entrée du mal en raison de sa naïveté !
    Mais il y a plus, avec la Corée du Sud où l’épidémie s’est aussi propagée par des groupes protestants le protestantisme et bien d’autres groupes religieux sont considérés comme des sources du déséquilibre social. Le Monde en ligne indiquait dans un article publié le 1er avril que la Corée sur Sud se découvrait malade de ses sectes[1]. Le lien entre Coronavirus et problématique sectaire est donc rapidement fait. Plus généralement, avec cet exemple et la chronologie épidémiologique, le religieux a un temps eut une image de déstructuration de l’équilibre social et sanitaire, alors que par définition il devrait être l’inverse. Il restera à observer le niveau d’inscription de ce constat dans la mémoire collective après l’épidémie.

     

    • Le questionnement du lien social.

    Il ne va pas vous étonner que pour le sociologue que je suis cette dimension est la plus importante. C’est elle qui structure, sédimente toutes les autres.
    Le confinement impose un bouleversement des liens sociaux. La proximité relationnelle, physique, qui a été conquise au prix de grandes avancées médicales, redevient source de danger. Il faut donc réapprendre la distance, trouver, construire la bonne distance.
    Cette recherche de la bonne distance est une constante dans les groupes religieux protestants millénaristes messianiques(qui croient en la fin des temps et la venue d'un messie dans une chronologie où 1000 années interviennent). Paradoxalement, le confinement se rapproche d’une vision du monde que l’on retrouve dans les groupes religieux en particulier chrétiens protestants millénaristes. Ils se considèrent comme des espaces relationnels où les individus acquièrent les croyances et normes pour correspondre aux attentes divines et vivre l’élection. Cela se traduit par des liens sociaux semis ouverts si on accepte de prolonger les notions wébériennes. En effet, le groupe développe des attraits de relations sociales fermées, d’entre-soi, considérant que c’est ce seul cadre qui est propice à un vécu conforme aux injonctions divines. Mais il développe aussi des relations sociales ouvertes car il faut sensibiliser l’ensemble de la société à changer, à réorienter croyances et comportements vers celles que défend l’organisation. 
    La nature et la forme des relations sociales vont sans doute évoluer dans les groupes religieux. Qu’elle sera la bonne distance à l’intérieur du groupe ? Toute la société est renvoyée d’ailleurs à cette question : Comment désormais échanger physiquement ? En ce sens le coronavirus est modifie le rapport à autrui dans plusieurs sociétés ?
    Finalement, en particulier pour les groupes religieux se repose le sens à donner à la notion de communauté. Certainement il n'y aura pas de grands bouleversements dans la réponse à la question, mais la communauté va aussi être approchée comme un espace de la construction de la bonne distance sociale.

     

    • La consolidation et la recomposition numérique de la téléspiritualité

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    C’est une continuité non surprenante du point précédent. Comme pour le télétravail les groupes religieux ont du rapidement se remobiliser pour maintenir le lien social. Le numérique au travers des nombreuses applications a pris le relais de l’absence des rassemblements physique. Zoom, WhatsApp ou encore les plateformes comme Discord sont des appuis majeurs. La forte utilisation de ces dernières n’est en rien une nouveauté dans l’univers religieux. Il s’agit ici simplement d’une amplification. 
    Dans ce contexte numérique du lien social, la quête d'une reconstruction des rencontres hebdomadaires semble être un besoin fort. Les individus privilégient ainsi les outils vidéo le samedi pour ceux qui pratiquent le sabbat, et le dimanche. Les membres privilégient les supports, les programmes officiels tout en profitant des autres ressources. La téléspiritualité que l’on observait depuis longtemps prend un essor. Elle n’est plus un outil de personne qui butinent de croyances en croyances, d’un individu éloigné géographiquement de sa communauté, ou encore des "fans" d'un leader charismatique; elle devient durant au moins la période du confinement le ciment communautaire.

    Mais la rencontre entre diffusion officielle et construction de son propre contenu, comme permet les multiples outils numériques, notamment et surtout les réseaux sociaux, va-t-elle contribuer à un bricolage, une sorte de cuisine personnelle de croyances ? Le sociologue a tendance par l’accumulation d’enquêtes sur le sujet à répondre positivement. Reste à voir si, en cette période d’incertitude qu’entraîne la pandémie si les individus privilégient un retour à des fondamentaux, à des certitudes. 

    • « le confort » du confinement

    A bien regarder, le confinement n’est pas une situation étrangère au religieux. Comme faisait remarquer le sociologue et bibliciste Frederick de Conninck, un parallèle certain peut être réalisé avec nombres de situations bibliques. L’exemple de Paul, incarcéré, ou plutôt assigné à résidence et qui écrit aux Colossiens est utilisé pour aider à accompagner les communautés dans ce contexte de confinement. Cette comparaison renvoie à un aspect ontologique du christianisme millénariste messianique. Le confinement est utilisé aussi pour rassurer. Comme l’exemple paulien, il s’agit aujourd’hui de dépasser l’isolement pour ne pas tomber dans l’esseulement. Renforcer le lien personnel avec la divinité mais surtout réenchanter le lien social (et le numérique est un levier). La recherche de l’essentiel est un objectif. Relativiser, y compris la place de certaines croyances est capitale à l’instar de ce que faisait Paul.
    Le confinement est donc un contexte qui peut être utilisé favorablement, opportunément pour reconstruire une relation avec le divin et les autres acteurs sociaux en l’orientant vers l’essentiel. Toute la difficulté à ce moment est évidemment la définition du superflu !

     

    • Le déconfinement dans le confinement.

    covid-19,coronavirus,religion,eglise adventisteFaire lien sans un lieu géographique précis, sans une église, sans un bâtiment n’est pas sans conséquence, même si la situation est provisoire. Dans de nombreuses organisations, la rencontre hebdomadaire est le temps fort. La pression sociale chasse l’absentéisme. Le présentiel un élément qui fait socle. Mais la téléspiritualité, à l’instar du télétravail, est brutalement devenue la norme. Cela renvoie à l’idée que l’Eglise, ecclesia, ne peut être résumée à un espace physique même chargé de sens. C’est finalement dans son versus communautaire, de lien entre les membres que l’Eglise prend sens. Et si elle se réalise comme nous le disions par un retour à l’essentiel, paradoxalement, en étant hors des murs (expression importante pour les sociologues) l’Eglise dépasse ses frontières et peut être prend là une dimension minimisée par les murs ! Il y a là, selon moi, l’enseignement le plus important et qui correspond le plus aux attentes de la société globale.
    Décloisonner, libérer du superflu, le religieux en situation de confinement va à l’essentiel, le lien social sans les murs. Ce n’est pas la fin des murs, mais une occasion de les dépasser. C’est comme si le confinement est une opportunité certaine de déconfinement du religieux minoritaire pour rencontrer une société dont il est une composante, mais c’est toujours imaginé comme isolé, sans l’être.

     

    [1] Voir [https://www.lemonde.fr/international/article/2020/04/01/avec-le-coronavirus-la-coree-du-sud-se-decouvre-malade-de-ses-sectes_6035234_3210.html] Visité le 02 avril 2020.

  • Santé, Anthropologie et adventisme. Introduction acte 1

     

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    [MISE A JOUR]

    Si vous êtes habitués à lire ce blog, vous savez que je défends l'idée que l'adventisme est une religion de la santé. L'idée n'est pas nouvelle. Certains on cru voir une conception de l'adventisme comme une religion qui adorerait la santé. Mais non, on est loin de cette caricature.

    Depuis quelques jours et pour 3 mois, les adventistes sont invités à étudier hebdomadairement des réflexions autour de la guérison et la santé. L'occasion était trop belle pour revenir en détails sur la notion de religion de la santé. Pour ce faire, nous allons prendre notre temps et durant le trimestre qui vient de s'ouvrir développer cette idée. Plusieurs étapes seront nécessaires. Les premières consistent à bien concevoir la notion de santé. C'est ce que je vous propose au travers de plusieurs notens qui reprendrons des notions de l'anthropologie de la santé et de la sociologie du fait religieux. Commençons par la notion de maladie/santé.



     

     

     

    Chacun de nous à plus ou moins une expérience de la maladie qu’elle soit plus ou moins grave. Au cours de notre existence, nous avons tous été enrhumés, grippés, etc. Nous connaissons tous dans notre entourage un parent, un ami atteint d’une maladie plus ou moins grave (problèmes cardiaques, cancer, etc.).

    A partir de là, il est possible de donner une définition de la maladie. Il s’agirait d’un état qui à un moment donné affecte le corps d’un individu et que la médecine aurait pour fonction de décrire et auquel elle tenterait de répondre en apportant un traitement.

    La maladie incarne une définition psychologique et sociale puisqu’elle touche à la fois des individus au sein d’une société et aussi car elle entraîne une réponse de la société (une thérapie), c’est à dire que les individus d’une société s’organisent autour de soins pour lutter contre la maladie (c’est l’exemple éloquent des systèmes de santé que l’on connaît actuellement ; système de santé qui repose sur la mise en place d’actions prioritaires en matière de santé publique. Il repose de nos jours sur quatre axes essentiels :

    • la restauration de la santé lorsqu’un individu est malade. Restauration de la santé par la distribution de soins à cet individu malade).

    • La prévention qui cherche à éviter voire à réduire le nombre et la gravité des maladies ou des accidents.

    • La promotion de la santé qui met à la disposition des individus la possibilité d’augmenter leur capital santé.

    • L’éducation pour la santé qui a pour objectif de mettre à portée de tout le monde l’information nécessaire pour la conservation d’une bonne santé.


    Ainsi, la maladie n’a de sens qu’en fonction de l’homme pris comme un tout : un être biologique, psychologique et social. Par les visites chez le médecin, la mise en place d’examens, de traitements qui ponctuent l’expérience du l’individu malade, on en est venu à modeler la réalité biologique qu’incarne la maladie.

    Aussi, en diagnostiquant une maladie, le professionnel de la santé ne fait pas que rendre compte d’un état pathologique de l’organisme. Il porte un jugement qui dépasse l’état organique de l’individu, il lui assigne une position dans la société, c’est à dire celle d’un malade.

    Néanmoins, il est important d’intégrer l’idée de FREIDSON selon laquelle la médecine d’aujourd’hui n’a rien d’absolu : c’est une institution sociale qui domine notre époque mais pas forcément d’autres. La médecine n’est pas quelque chose de définitif. Ni d’un point de vue temporel ni d’un point de vue géographique. Autrefois, la maladie était considérée comme un élément religieux notamment dans les sociétés primitives ou dans les sociétés non-occidentales.

    Aussi, la notion de médecine savante n’est pas propre à l’occident puisqu’une médecine savante apparaît lorsque deux conditions sont réunies :

    • une profession médicale

    • une tradition écrite donc fixée

    La médecine savante existe à partir du moment où il y a une autorité instituée qui garantit la légitimité du savoir et qui va contrôler les modalités de son apprentissage (par la sanction, le diplôme) de son exercice. Le savoir des thérapeutes (médecins) se distingue du savoir profane (non professionnel). Dans de nombreuses sociétés, on observe des spécialistes des maladies mais ce ne sont pas des professionnels (généralement ce sont des agriculteurs). La légitimité du savoir et de la pratique est dans ce cas garantie d’une autre manière, soit sur la base d’une reconnaissance collective, soit par des connaissances symboliques (croyances religieuses). Globalement, dans ces sociétés, la distinction entre savoir médical et savoir profane n’est pas institutionnalisé.

    Les travaux sur la médecine savante sont très abondants mais ce sont en priorité des travaux qui proviennent d’historiens qui s’intéressent aux textes mais négligent la pratique de terrain, la culture vécue ou encore les mécanismes sociaux qui ont institutionnalisés le savoir médical. Cette situation résulte d’une répartition des tâches entre universitaires, entre disciplines au XIXé : les sciences sociales ont été divisées plusieurs domaines :

    • L’anthropologie. L’anthropologie des mondes contemporains qui va apparaître vers les années 60. Jusqu’à la fin des années 60, les travaux de l’anthropologie médicale vont porter essentiellement sur les pratiques thérapeutiques et le discours des thérapeutes. A partir des années 70, il va y avoir un changement d’orientation et de plus en plus l’intérêt des chercheurs va se porter sur le discours profane de la maladie et sur l’objet « maladie » en tant que tel. Ce qui va intéresser l’anthropologue, ce n’est pas la maladie en tant que catégorie objective de la médecine mais la manière dont les gens ordinaires élaborent leur propre notion de la maladie à travers leur propre expérience et les contacts, les interactions qu’ils ont avec les spécialistes.

    • L’ethnologie. Dans les travaux d’ethnologie, on trouve très souvent des descriptions de rituels thérapeutiques mais la question de la maladie n’est pas abordée en elle même mais souvent sous l’angle de la théorie des religions.. (Ex : ouvrage de EVANS-PRITCHARD, Sorcellerie, oracles et magie chez les Azandés, Gallimard, 1968. Dans cet ouvrage, EVANS-PRITCHARD décrit les rituels thérapeutiques et s’intéresse à la fonction sociale de la religion dans les pratiques thérapeutiques.

    • La sociologie. La sociologie médicale apparaît dans les années 40 ; elle étudie l’institution médicale occidentale avec plusieurs objets : l’étude de l’institution hospitalière, l’étude du comportement des malades, le rôle de la médecine dans la production sociale à l’intérieur de nos sociétés contemporaines. (Voir à ce titre M. AUGE et C. HERZLICH, Le sens du mal. Anthropologie, histoire, sociologie de la maladie)


    La première formulation est le fruit des travaux d’un sociologue américain TALCOTT PARSONS (1902-1979). Il s’agit d’un auteur qui a cherché à construire une théorie générale en étroite relation avec les autres sciences de l’Homme (économie, histoire). Dans le champ de la santé, il définira, nous le verrons, un rôle social du malade et un rôle social du médecin.

    D’autre part, les maladies qui touchent les individus et les sociétés diffèrent selon les époques. L’exemple parlant est en effet celui des épidémies d’autrefois auxquelles sont venues succéder d’autres formes de pathologies que le cancer ou le sida qui nous sont familières aujourd’hui.

    Dans chaque société, la maladie paraît indésirable. Aujourd’hui, les malades doivent être secourus. Toutes les sociétés ont développé des modalités de réponse au malheur que constitue la maladie. Cependant, la maladie est socialement et culturellement définie. C’est à dire que chaque société, chaque culture reconnaît des maladies spécifiques non forcément reconnues par d’autres sociétés ou d’autres cultures. MICHEL FOUCAULT dit : « la maladie n’a sa réalité et sa valeur de maladie qu’à l’intérieur d’une culture qui la reconnaît comme telle ». Ce qui amène à considérer que la maladie est un état qui est pourvu de significations sociales, « Être malade » ou « bien portant » n’a pas la même signification sociale. La santé présente un caractère fortement normatif (Une norme est une règle qui régit les conduites individuelles et collectives. S’en écarter entraîne une forme de déviance). Être en bonne santé revient à être « normal » alors qu’être malade présente un état « anormal » selon les normes définis par la société. Cette définition de la maladie comme « normale » ou « pathologique » donne tout son sens à une implication dans le champ de la santé de la sociologie. En effet, elle pose le problème de savoir s’il faut considérer que la maladie est une forme de déviance en ce que le fait d’être malade écarte l’individu d’une norme établie et construite autour de la « bonne santé ».

    Dire que les maladies sont culturellement définies n'empêche pas de montrer que la santé est par essence une notion qui se construit autour de 3 éléments important

    - l'individualisation

    - la subjectivité

    - les contraintes sociales et culturelles.

    Tout cela dans les notes à venir.


  • Soutenons RTS Religion

    Soutien RTS religion; PétitionL'offre d'analyse du fait religieux sur les medias francophones généralistes diminue dangereusement. L'annonce de la Radio et Télévision Suisse Romande de la fin des émissions de la rédaction de RTS religion ne peut qu'inquiéter. Pour avoir participer une humble fois à ses émissions, j'ai pu constater, également comme auditeur de la qualité de traitement du fait religieux. Dans un monde où l'ouverture vers autrui n'est plus la règle, supprimer de tels espaces conduit à défendre la fermeture, l'ignorance. Alors on dira qu'il faut attendre ce qui remplace les émissions de RTS. Mais pourquoi changer ce qui marche pour un hypothétique futur? 

    En soutien à RTS, je vous invite à signer la pétition à l'adresse http://soutenonsrtsreligion.info/

    Fabien HünenbergerFabien Hünenberger qui produit et anime les émission, fait depuis des décennies une action de pédagogie exceptionnelle dans l'espace francophone. A l'heure où l'obscurantisme emporte la vie sans distinction en se parant de religion, il faut soutenir le travail de Fabien et de toute la production pour le bien commun. Loin des logiques irrationnels, il faut porter votre signature à la pétition de soutien. 

    Télécharger également le texte de soutien

  • Diffamation des religions et liberté religieuse

    Conscience and Liberty, Conscience et Liberté, Droit des religions, AIDLR; Association internationale pour la défense de la liberté religieuse, Karel NowakLe dernier Conscience and Liberty est disponible depuis quelques semaines en kiosque. La Revue est également disponible en français. Editée par l'AIDLR, la revue Conscience et Liberté consultée par les décisionnaires dans de nombreuses organisations internationales (Conseil de l'Euorpe, Cour Européenne des Droits de l'Homme, Assemblée Générale de l'ONU...). Le dernier numéro est d'actualité et s'inscrit dans l'histoire de l'AIDLR. Son titre Defamation of Religious and Freedom of Expression pour la version anglaise et La diffamation des religions et la liberté religieuse pour les lecteurs francophones.

    J'y consacre un article Religious Defamation, Stigmatization and Social Norms (Diffamation religieuse, stigmatisation et normes sociales – quand le droit européen prend de plus en plus acte de la complexité sociale).

    Tous les articles de ce numéro sont de qualité. Un comité éditorial d'une grande efficacité en est le garant. Régis Dericquebourg m'indiquait sans détour : « ce numéro est bien ». Il a raison. J'ai été sensible à l'éditorial de Karel Nowak, Secrétaire général de l'AIDLR. Il note la pluralité des orientations des auteurs et le souhait de la revue d'être un lieu de débat, quitte à présenter des analyses qui ne sont pas des convictions de l'AIDLR. Outre ce point d'ouverture, l'éditorialiste indique des points majeurs autour de la diffamation religieuse. Le premier est le conflit qu'il peut avoir avec la liberté d'expression, surtout dans sa version médiatique. Le second est « une tension et un malaise croissants dans certaines parie du monde – notamment en Europe – par rapport aux immigrations ».

    Conscience et Liberté 2010 Couv.jpgUne voie de sortie pour le Secrétaire est la reconnaissance de l'universalité des droits de l'homme par toutes les parties impliquées. Cette perspective à elle seule justifie les activités de l'AIDLR et le prolongement scientifique de ce dernier au travers de Conscience and Liberty.

     

     

    SOMMAIRE ET EXTRAITS EN FRANCAIS DU NUMERO 

    SUR LE SITE DE L'AIDLR

     

  • La Fédération Suisse Romande et du Tessin lance le festival de la santé

     Eglise adventiste, Religion, Santé, Suisse, Fédération Suisse Romande et du Tessin, Festival de la santéLa fédération adventiste de Suisse Romande et du Tessin (FSRT) lance le festival de la Santé. Cette initiative traduit parfaitement le concept de Religion de la santé dont l’adventiste est une illustration majeure. En lien avec les professionnels et autorités, la FSRT a construit une programmation où sur la base des acquis scientifiques elle sensibilise le public à différents équilibres indispensables à la santé. Le handicap est un thème central pour cette première. Exercices, expositions, débats… sont des déclinaisons proposées. Ce qui me paraît capital et faussement banal est l’idée que la santé est un ensemble d’équilibres aux effets relationnels. Si cette conception de la santé dans sa dimension interactive est un acquis, elle a été de tout temps portée par l’adventisme. La santé est non seulement un sentiment de bien être (pas une absence de pathologie!) mais aussi une relation équilibrée avec ses entourages. Ce n’est pas seulement la perception d’un équilibre biologique et psychologique, mais également social. Dans une société, où de nombreuses pathologies, souffrances sont indiscutablement issues des déséquilibres relationnels, l’initiative adventiste est à saluer.
    D’autre part, comme religion de la santé, l’adventisme Suisse fait de cette manifestation d’abord un outil de promotion de la santé. De ce fait, l’action sanitaire éducative est capitale. Elle montre bien que les religions de la santé ont une éthique de responsabilité qui ne doit pas être assimilée à du prosélytisme. En effet l'objectif n'est pas la conversion mais d’établissement de bonnes pratiques de santé. Cependant, cela s’inscrit dans l’idée de mission. Soyons précis. Je l’ai écrit dans mon ouvrage Regards croisés sur l'Eglise adventiste du septième jour, l’éthique de responsabilité c’est se sentir responsable du bien être et du salut de concitoyens et responsabilliser ces derniers. C’est avoir des actions concrètes dans ces buts. Dans ce cadre, le bien être supplante le désir de conversion, sans l’exclure. Et c’est ce qui s’exprime très explicitement dans nombres de manifestations de santé adventiste en Europe francophone surtout sous l'impulsion Suisse. La FSRT mène des actions de santé, pédagogiques ouvertes, d’essence adventiste, scientifiques, montrant la perception large de la mission religieuse au sens d’une éthique de responsabilité, sans bercer dans le prosélytisme.

    C’est un équilibre difficile que la FSRT a su construire. En ce sens, le festival de la santé, additionné à d’autres actions de la FSRT, permet à l’adventisme Suisse de consolider sa place d’acteur social dynamique. Elle répond ainsi aux attentes sociétales vis-à-vis du religieux. Mais certainement le contexte Suisse favorise cette consonance entre attentes sociétales (et sociales) et l’offre religieuse adventiste. Et hors contexte Suisse, indiscutablement, la FSRT montre dans l’adventisme francophone en pays développés une perspective à suivre, voir à reproduire.

    En complément lire sur le sujet :

    La santé dans l’adventisme, une action ouverte et non du prosélytisme

    Religion de guérison et religion de la santé

    Santé anthropologie et adventisme

    Et l’ensemble des notes sur les liens entre adventisme et santé

  • La santé dans l’adventisme : une action ouverte et non du prosélytisme

    sante_01.jpgLa question posée par un journaliste a été la suivante : comment les adventistes arrivent-ils à faire de la santé du prosélytisme ? Surpris par l’orientation de la question, j’ai répondu : « de la même manière que Sœur Emmanuelle et que le HCR » ! Il a compris que je voulais dire que sa question était fausse et qu’en cas de prosélytisme il s’agit d’une conséquence assumée, souhaitée, mais en aucun cas le but premier de l’Eglise Adventiste dans ses activités sanitaires. Sur quoi je m’appuie pour le penser ?

     

    L’adventisme est une religion de la santé. Je rappelle que cette expression ne veut pas dire que l’adventisme adore la santé ! Certains le comprennent encore, sans que je n’arrive à comprendre pourquoi. Personnellement je ne l’ai jamais dit ou écrit. Rappelons qu’une religion de la santé comme l’Eglise Adventiste se spécifie par son insistance sur toutes les pratiques préventives, sans omettre le curatif. Ce souci découle d’une conception holistique de l’individu. Ce dernier en plus d’être un ensemble d’organes est considéré une créature de Dieu. L’adventisme considère l’individu comme un gestionnaire de ce corps confié par Dieu. En plus de l’invitation à être un bon gérant des dons de Dieu (comme le corps) veiller à être en bonne santé entraîne incontestablement des impacts positifs sur la santé tel que peu le mesurer et le traduire toutes les avancées médicales.

    Pour mieux gérer le corps, en plus des pratiques de préventions, l’adventisme considère le curatif comme nécessaire. Ce dernier est avant toute normé en France par le savoir médical conventionnel. S’ajoute toutes les formes de connaissances qui ne rentrent pas en conflit avec les conceptions théologiques du groupe. Il se traduit également autour de la santé. Depuis le XIXe cette église propose des actions pédagogiques tournées vers toutes les populations pour sensibiliser au développement de connaissances et de comportements qui optimise la santé.

    L’adventisme, religion de la santé, n’enferme pas ses actions. C’est là que mon interlocuteur journaliste a décelé un prosélytisme systématique. Il s’agit plutôt, sur ce point, ce que Max Weber appelle des « actions ouvertes ». Elles se dirigent vers les individus qui ne sont pas membres du groupe. Evidemment cette ouverture peut avoir des effets prosélytes, mais tel n’est pas le but initial, même si cela peut être, dans certains contextes culturelles surtout, un effet recherché. En France nous ne sommes pas dans cette situation. L’Adventisme n’a pas d’action sanitaire, portée par sa hiérarchie et dont l’ambition est de convertir. C’est pour cela que je préfère parler « d’actions ouvertes » et non de prosélytisme pour ce qui est du cas de la France Hexagonale.

    Cette ouverture se comprend par la notion de responsabilité. En effet l’adventisme considère qu’il est de sa responsabilité d’informer sur les bons comportements hygiéniques à avoir. C’est même un quasi devoir. Faciliter l’accès au savoir sanitaire résulte du fait que l’adventiste se considère comme responsable de la circulation de bonnes et vraies informations dans la société. Il se pense responsable, indirect, de la bonne santé de ses congénères. C’est une simple vision étendue de la notion de fraternité. D’ailleurs, il est important de faire tous ce qui est possible pour atteindre cet objectif car il est conforme aux attentes divines.

    J’ai la tentation de dire que l’essentiel est là. En effet, la notion de responsabilisation, ou plutôt de responsabilisation fraternelle étendue (action ouverte) se fait dans l’optique de la bonne santé. Elle est poussée par une conception responsabilisante qui prend ses racines dans la chrétienté et s’est amplifiée dans l’adventisme, qui dès son origine à donné une place importante au savoir sanitaire et médical. Que ce soit dans ses maisons de retraites, dans les thérapies collectives de sevrage, les soutiens en relation d’aide, l’humanitaire, les soins médicaux… l’adventisme s’est donné pour mission de faire connaître sa vision de la bonne santé. Cette dernière est évidemment liée à la théologie du groupe. Mais en France (je ne parle que de ce cadre) elle n’est pas aujourd’hui un levier prosélyte.

    Indirectement, j’ai rencontré dans mon étude sur la conversion des individus attirés par l’adventisme au travers de ce souci marqué pour l’acquisition d’une meilleure santé. A ce moment, évidemment, l’Eglise Adventiste insiste sur les spécificités de son regard sur la santé et invite l’individu à découvrir les autres éléments de sa théologie. A l’inverse je n’ai pas rencontré de stratégie conçues et validées hiérarchiquement dans le groupe qui visait à faire d’une action sanitaire un levier prosélyte. D’ailleurs j’ai plus remarqué une méfiance sur cela. Face au risque de vite être considéré comme un groupe dangereux et manipulateur, les organisateurs veillent fortement à bien démarquer sensibilisation à la santé et pratiques prosélytes. Cette précaution est d’ailleurs très forte en France.

    Cependant le regard adventiste sur la santé est indéniablement propice à l’établissement de liens consonants et forts avec la société globale. La quête actuelle d’une bonne santé et son expression au travers du bio, de l’équilibre alimentaire, de la crainte du carné, du sport, de la maîtrise allopathique, de l’équilibre entre l’homme et son environnement naturel… sont présents dans l’adventisme depuis le XIXe siècle. Ce n’est donc pas l’adventisme qui s’est converti stratégiquement à une tendance nouvelle, mais une tendance nouvelle qui est ancienne dans l’adventisme ! De fait c’est la société globale, ici, qui se rapproche de convictions qui ont une déclinaison adventiste. En facilitant l’accès à la bonne santé aux individus ces derniers pourront plus facilement développer des aptitudes psychologiques (même s’il faut pour cela d’autre voie et apports). Ce regard sera propice à l’établissement de consonances, de liens, entre la théologie adventiste et les attentes de la société globale. Toutefois il faut souligner que ces actions ouvertes s’inscrivent dans la missiologie adventiste.

    Ce qu’il faut retenir c’est que l’émergence de la consonance entre valeurs sanitaires adventistes et valeurs sanitaires de la société résulte des changements modernes de notre société. Cette consonance peut donner l’impression d’un prosélytisme. En France contrairement à ce que l’on pourrait penser, elle ne donne pas naissance à une campagne prosélyte adventiste.

    La place de la santé dans ce groupe religieux et surtout les impacts positifs sur la santé des individus (espérance de vie, résilience, convalescence plus rapide à situation comparable… selon les enquêtes de santé américaines et les différentes études de cancérologie) permettent de réinterroger le rapport de la société globale avec la santé.

    Brefs, revenons. Non il n’y a pas en France de stratégie prosélyte avec la santé, de manière institutionnelle. Un individu peut suivre un programme adventiste sanitaire, sans se convertir ! Ce n’est pas parce que l’on met un enfant dans une école catholique que celle-ci aura pour ambition d’en faire un catholique ! C’est la même chose. Et en France l’Eglise Adventiste veille à ce qu’un mélange des genres n’existe pas. Le risque juridique est là. Mais surtout il faut veiller à ne pas donner d’arguments aux réfractaires du religieux, dans un contexte de méfiance institutionnalisée du religieux.

    Plus haut je disais que je n’ai pas rencontré de stratégie adventiste validée par la hiérarchie et dont le but est de faire un lien prosélyte entre santé et religion. Je suis précis ici car il existe localement des initiatives qui font ce lien. Il s’agit de stratégies localement conçues et exprimées.

    A grande échelle, je pense aux « expos santé » l’idée est de montrer la validité scientifique du regard adventiste sur la santé. D’ailleurs au risque de déplaire, ces expos montrent plus des pratiques de santé largement connues que des spécificités adventistes. Ce sont des expos de préventions quasi identiques à ce qui est disponibles dans des associations laïques, dans les DDASS, les établissements scolaires, etc.

    Là où certains voient du prosélytisme c’est dans leur surprise de trouver un lien positif entre un groupe religieux et la santé, même approchée scientifiquement. Cette surprise ne doit pourtant pas entraîner un lien direct avec une stratégie prosélyte en France comme certains sont tentés de le faire. Là est mal connaître la relation entre l’adventisme et la société globale en France.

     

     

  • Formation Agir ”Sciences sociales et religion”

    5905cbd0f747c7243098406da6ba9cc8.jpgJe vous livre l’information avec retard. L’Association d’impulsion adventiste, AGIR, qui se donne pour comme objectif non exclusif de permettre d’être un lieu de formation et de réflexion en direction des adventistes. Dans ce cadre, avec un plaisir que je ne voile pas, j’assure depuis hier (mardi 29 septembre 2008) des interventions mensuelles d’une durée d’1h30. La formation s’intitule « Sciences sociales et religion ». La première a eu lieu à la Sorbonne dans une ambiance de convivialité extrême. Le but de la Formation est de permettre à un large public de se familiariser au raisonnement des sciences sociales et plus particulièrement à celui de la sociologie du fait religieux. Le premier public visé est celui des adventistes.
    Cette initiative est à saluer. En effet elle répond à un besoin criant de membres des communautés adventistes qui veulent s’enrichir de connaissances, pour mieux appréhender les complexités du religieux en France.

  • Santé, anthropologie et adventisme – Acte 2 (Extrait de cours IFSI du nouveau référentiel infirmier)

    « Le mot »

    health church.jpgLe vocabulaire qui explicite la santé est très riche. Frustrons-nous en le regardant furtivement. A lui seul il impose de considérer la santé au-delà de la définition médicale. Cela conduira à faire le lien avec une certaine vision religieuse de la santé.

    En grec deux mots se distinguent pour parler de santé. Le premier est hugiainô qui signifie être en bonne santé, se porter bien. Racine du mot hygiène, il ne s'applique pas seulement aux personnes mais aussi à un pays. Cette vision est encore présente quand nous parlons de la santé économique et sociale d'un Etat. L'autre terme est noséô qui signifie être malade et s'applique aussi à une très grande panoplie de situationS et pas uniquement à l'individu. Un autre mot mérite d'être signalé, il s'agir de sôzô qui signifie protéger d'un danger ne pas tuer, épargner, sauver. Un dérivé comme sôtéria (salut) permet de souligner le lien complexe entre santé et religion.

    sante_01.jpgLa mythologie grecque va aussi fournir des personnages connus dont les noms vont être les racines de mots utilisés tous les jours pour parler de la santé. Parmi la multitude d'exemples il y a Hygiè. Elle est la fille d'une famille de médecins qui prétendait descendre d'Asclépios. Asclépios était le fils d'Apollon, dieu de la lumière et puissant guérisseur et de la nymphe Coronis. Asclépios était un brillant médecin. Il arriva même à ressusciter des morts! Zeus, aussi grand-père d'Asclépios ne toléra pas cette prouesse. Pour Zeus la résurrection ne pouvait être permise car elle avait des conséquences irrémédiables sur les grands équilibres de l'univers. Il fut donc contraint de foudroyer son petit fils qui n'avait pas respecté la frontière entre la vie et la mort.
    Des confréries médicales se sont par la suite autoproclamés descendants d'Asclépios. Avec une organisation bien hiérarchisée, secrète, stricte sur la protection de leur privilège, elles préfiguraient l'organisation actuelle de la médecine conventionnelle.

    Le vocabulaire latin va aussi fournir une profusion de termes autour du mot sanus. Plusieurs variations auront des significations non médicales. Sanarios désignera les personnes âgées. Sanitas le bon sens ou la raison. Sana res publica, plus connue, parlera d'un régime politique qui fonctionne bien. Male sanus fera référence à la personne déséquilibrée. Mais surtout, Sanare est le verbe qui signifie guérir, réparer, apporter une solution.
    pharmacie.jpgUn autre mot, Valeo va donner plusieurs autre mots très présents dans le français. L'une des déclinaison est valetudo pour qualifier le bon ou le mauvais état de santé. Il a donné valetudinarius qui signifie malade et valetudinarium, qui est le lieu de regroupement des malades, l'hôpital. On le retrouve en français dans valétudinaire.
    Valeo
    a aussi donné validus qui veut dire être robuste, bien portant, efficace, puissant. On retrouve valeo à la fin des échanges épistolaires. Il alimentait les expressions de salutations comme vale, valete (adieu) ou plus explicitement cura ut valeas pour inviter l'interlocuteur à prendre soin de sa santé.
    Un autre mot latin est salus. Il comprend la bienséance, c'est-à-dire le fait de savoir appliquer les normes sociales pour se présenter à autrui. Salus englobe également le bon état physique

     

    Une valeur universelle fondamentale

    La santé est la quette du bien être. C'est une recherche présente dans toutes les cultures. Il n'existe pas de société où la maladie n'est pas définit et la santé recherchée. Dans toutes les cultures des personnes spécifiques sont les dépositaires d'un savoir reconnu sur la santé.

    Toutes sociétés est aussi le support de croyances, rites, mythes où la santé a une place toute particulière. L'origine de la maladie est toujours expliquée. Elle peut être d'origine surnaturelle, l'effet d'un sort, la conséquence d'une attitude ou simplement la résultante de phénomènes physiques et biologiques.

    La santé est donc bien plus qu'un état corporelle. Elle est une valeur unanimement partagée. On le constate lors des vœux de nouvelle année. En maintes lieux du globe, on souhaite une « bonne santé » parce que c'est un bien, une valeur fondamentale. D'elle découle tout. Sans elle on est plus dans le monde de l'impossible que l'inverse.

     

    Une construction sociale

    OMS.jpgGénéralement la santé est présentée comme une notion claire et évidente. C'est principalement le cas en sciences médicales où elle est conçue comme l'absence de pathologie, de dysfonctionnement, voire d'infirmité. Mais à regarder avec attention tel n'est pas le cas.

    L'O.M.S conçoit la santé comme « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité »

    Cette approche de l'OMS confirme que la santé ne peut pas être considérée comme une notion stable. Elle varie en fonction des périodes historiques, des cultures ou encore des catégories sociales. La sociologie de la santé insistera particulièrement sur les éléments qui échappent à l'individu et qui influencent la notion de santé. En d'autres termes, la sociologie approchera la santé comme un fait social.

     

    Sentiments individuelles

    santé sciences.jpgLa santé est une notion qui dépend du contexte dans laquelle elle est construite. Mais quelque soi les contextes et les situations particulières, la santé implique le rapport de l'individu à son environnement et à son propre corps.

     L'individu est donc au centre de la construction de la santé. Rien ne vaut un exemple précis et classique.

    Ce n'est pas en allant chez le médecin que l'individu découvre qu'il est malade. En amont il a la sensation d'être malade. Se rendre chez le praticien c'est pour l'individu tenter de comprendre l'origine de son mal et les solutions qui peuvent y être apportées. La notion de santé et plus particulièrement de bonne santé dépend étroitement des représentations que nous avons de notre corps.

    Cette relation est très importante, elle transcende souvent l'opinion du praticien. Un deuxième exemple pour bien s'en rendre compte. Un individu convaincu d'être malade peut être en opposition radicale avec son praticien. En effet, il est classique pour des patients d'aller chez un médecin pour comprendre le mal dont-ils sont victimes et se voir opposer « Madame, Monsieur, tout va bien » après des examens poussés. Si le praticien se rend compte de l'insatisfaction du malade, il peut compléter sa réponse en le réorientant dans le système de soin. Mais cette réorientation peut amener la même réponse. Face à cette situation, souvent le praticien va évoquer le « stress ». D'ailleurs, souvent la notion de  stress est utilisé pour cacher l'impossibilité du professionnel à porter une réponse satisfaisante au patient. Sauf cas pathologiques sévèrement avérés par la psychiatrise et la psychologie le stress devient un révélateur de l'impuissance du praticien face au sentiment de mal être du patient.

     Du point de vue organique et de l'état des connaissances actuelles, l'individu n'est pas porteur de pathologie. Cependant, à regarder la définition de la santé de l'OMS le patient est malade. L'individu n'a pas un complet état de bien être physique, voire mental ou encore social.

     

    La santé, une notion instable.

    La santé ne dépend pas seulement du seul regard du médecin. laboratoire.jpgElle est le produit d'évolutions sociales, de la science, de la relation de l'individu à son propre corps tout en étant une valeur universelle. Parler de santé c'est se rendre compte qu'elle est tributaires de changements. La santé est donc, contrairement à l'évidence, une notion instable qui fluctue dans le temps, les contextes sociaux et entres individus.

     

     

    Tout l'objet de la sociologie et de l'anthropologie de la santé sera de mettre en évidence les variables qui expliquent cette instabilité.

     

     

    Instabilités et changements

    Noter que la santé est une notion instable c'est souligner son caractère évolutif. L'idée que l'on a de la santé, des gestes sanitaires, de l'hygiène, varient dans le temps en fonction de l'évolution du savoir scientifique, de la culture, du niveau de formation, de l'urbanisme ou encore de la catégorie sociale. Parmi les facteurs qui permettent cette évolution il y a la religion. Cela peut surprendre, mais loin d'être un élément qui freine la connaissance scientifique sur la santé le religieux le permet. Par contre, il oriente significativement cette évolution. C'est un fait. Alors ce qui nous intéresse c'est de constater comment la religion participe participe à l'évolution du savoir sur la santé. Nous tournerons essentiellement autour de l'exemple de l'adventisme. Il permettra d'insister le rapport entre savoir scientifique et religion d'une part. D'autre part, il permettra de noter un impératif majeur qu'est de considérer la santé comme un savoir qui englobe bien plus que le savoir scientifique. Oui, oui, vous m'avez bien compris. Avec l'anthropologie de la santé, la science est qu'un des éléments qui aident à construire la notion de santé. Parmi eux il y a une vision de la santé qui ne s'oppose pas globalement à la science et mieux, participe à son dynamisme, évidemment, sur des secteurs compatibles au discours religieux. C'est ce que j'ai appelé les religions de la santé. Nous verrons cela dans à partir d'exemples empriques précis qui permettront de parler de la place de la culture.

  • Grèves en Guadeloupe, identité et religion. Acte 3.

    guadeloupe grève 05.jpgContinuons notre rétrospectice sélective de grèves en Guadeloupe pour mieux comprendre la dernière grève de 44 jours mené par le LKP.
    Le mouvement de mars 1975 s'épuise. Les grévistes sont moins mobilisés. Tout semble indiquer la fin du mouvement sans que les revendications soient satisfaites. C'est là que l'imprévisible se produit et entraînera un tournant inespéré pour les grévistes. Un homme, le Père Chérubin Céleste entame une grève de la faim pour que les demandes des grévistes soient satisfaites. Le père C.C. n'est pas un inconnu. Il a soutenu la grève de 1971 et a poussé l'Eglise Catholique à marquer son intérêt pour la lutte sociale des ouvriers. Le Père C. C. a u discours politique construit. Il incrimine les usiniers et l'Etat, complices  de laisser la situation sociale guadeloupéenne se dépérir.

    Guadeloupe grève 07.jpgLe 31 mars 1975, dimanche de Pâques, la Chapelle était devenue trop petite pour accueillir les milliers de personnes ayant fait le déplacement pour soutenir C. C. Le pouvoir décide d’intervenir en mobilisant les CRS. Le lendemain, lundi 31 mars, au petit matin, la Chapelle est entièrement encerclée alors que se trouvent rassemblés autour du Père CELESTE plusieurs centaines de personnes. A 6 heures, l’assaut est donné. Asphyxiés et matraqués, les manifestants et les familles riveraines doivent évacuer les lieux et se disperser dans la nature. Le Père Chérubin CELESTE sera extrait de la Chapelle et emmené dans un lieu secret tout en continuant à refuser de s’alimenter. Cette intervention dans un espace religieux entraina la réprobation de l’opinion publique localement et au-delà de la Guadeloupe. Devant le tollé suscité les négociations reprirent. Constatant le dialogue renoué le Père C. C. se réalimenta. Les négociations furent rapides et le salaire des ouvriers agricoles est aligné sur celui des ouvriers d’usines et augmente de 20%. De son côté le prix de la tonne de canne est augmenté de 40% et fixé en fonction du prix de revient, même si la méthode de calcul en fonction de la richesse était encore maintenue.
    Avec la grève de 1975 le mouvement social antillais obtint une victoire inespérée. Elle rappela l’importance de la lutte mais surtout de l’implication de l’ensemble des acteurs, dont le religieux. Sans le vouloir un Père Catholique (peut être moins l’Eglise Catholique) apparaissait comme une voie possible de progrès social en consonance avec les luttes sociales.
    Les années 80 sont également des années de luttes intenses mais le contexte de leur déroulement à changer. L’arrivée de la gauche au pouvoir et surtout le fort sentiment que les luttes sociales n’aboutissent pas à de réelles avancées, vont entraîner vers une nouvelle forme de lutte qui marquera radicalement les luttes sociales antillaises. Nous y reviendrons dans la prochaine note… A suivre.

     

  • Un blog à découvrir : Droit des religions.

    Ceux qui viennent ici connaissent le regard judicieux (jeu de mots facile !) de Sébastien Lherbier-Lévy en lien dans notre rubrique Droit et religion, du même nom que son blog. Avant de dire quelques mots sur son Blog, je peux (et c’est le but d’un blog) donner une impression toute personnelle.
    Seb est juriste de formation et s’implique dans une démocratisation du savoir juridique. De fait, il est au fait de nombres de débats de la sociologie des religions, ne tombant pas dans le piège classique de juristes, qui considèrent le droit comme une doxa, à la différence de ce qu’ils proclament.
    Avec le blog Droit des religions, nombres d’usagers peuvent avoir une perspective générale de débats et d’arrêts commentés.

    Je suis particulièrement attiré par sa lettre. La qualité des informations du site est d’autant plus appréciable, que cette dernière n’est pas une structure lucrative. Ceci renforce le constat général, qu’avoir le religieux comme champ de recherche oblige l’analyste à être un artisan. Droit des Religions permet d’accéder à la qualité du travail artisanal, dans lequel je me reconnais. Une véritable initiative à encourager par vos visites et clics.

     

     Je profite de l'occasion pour également inviter à aller sur le site de l'Association Internationale pour la Défense de la Liberté Religieuse. Nous reparlerons sans doute de cette dernière qui est d'impulsion adventiste et bénéficie d'une incontestable notoriété.

  • Grèves aux Antilles, identité et religion. Acte 2

    guadeloupe grève 01.jpgDans notre dernier commentaire sur la dernière grève aux Antilles je notais que le mouvement social est un acte fondateur de la société antillaise. Il inscrit la relation avec l'hexagone dans une dimension conflictuelle. Cette dimension pousse à beaucoup relativiser le vocabulaire utilisé pour qualifier la dernière grève. Soyons précis, parler de « crise » me parait très inadapté. En plus d'être éloigné de la réalité le vocable de « crise » a des influences fortes sur le regard qui peut être porté sur la société antillaise et les propositions dans un contexte d'Etat généraux des Antilles. Par définition la crise est une situation exceptionnelle qui rompt (pix!) avec le normal, l'habituel, le commun, l'attendu. Elle exige de mettre en place une stratégie pour qu'elle soit la plus brève possible. Rien que simple retour pour quelqu'un qui connait les Antilles permet de dire que la notion de crise s'adapte difficile à la dernière grève. En effet celle-ci n'est pas exceptionnelle, était en partie souhaitée et s'inscrit dans une histoire très dense des luttes sociales.

    Les grèves, un « dense patrimoine » (Je reviendrai par la suite sur mes sources)

    guadeloupe grève 02.jpgOk. J'exagère avec le terme de patrimoine. Mais il a l'avantage de faire comprendre immédiatement ce dont il s'agit. La protestation sociale au travers de grèves est devenue un monde relationnel permanent entre ceux qui ont les forces de production et le salariat antillais, principalement guadeloupéens. La Guadeloupe est d'ailleurs, incontestablement, l'épicentre de la protestation sociale antillaise. La dernière grève l'a rappelé brutalement. Le dialogue social est plus rude qu'en Martinique. Il y est moins rugueux par exemple entre le patronat et les ouvriers.
    Lors de la dernière grève de 44 jours menée par le LKP et qui a fait tâche d'huile dans d'autres département d'Outre-mer dont la Martinique, les commentateurs ont au mieux que la Guadeloupe a été le théâtre d'une grève en 1967. Mais cette allusion était très orientée car elle considérait 1967 comme une préfiguration de 1968 en France. Ce raccourci est réducteur comme je l'ai signalé. Des leaders politiques et syndicaux s'y sont arrêtés oubliant de rendre à la Guadeloupe ses particularités. Je ne ferai pas l'historique de grèves aux Antilles. Mais pour illustrer mon propose voici un bref retour sur quelques grèves que j'ai sélectionné.

     

    1910.
    Jusqu'en 1910 des conflits sociaux sporadiques apparaissent. Ils marquent l'insatisfaction des anciens esclaves face à le traitement de salariés qu'ils découvrent. C'est aussi la période où il y aura des manifestations pour protester face à l'afflux de mains d'œuvres étrangères, à bas prix, pour remplacer les esclaves dans les plantations. Ce sont des petites poussées de contestations très faiblement structurées. A partir de 1910 la Guadeloupe devient l'épicentre de la contestation sociale aux Antilles. A la différence de la Martinique l'Île est moins marquée par la présence de békés, descendants d'esclavagistes et détenteurs des richesses. En Guadeloupe l'abolition de l'esclavage s'accompagna d'une vindicte anti békés. Déjà chassés avant l'arrivée de Richenpence lors du rétablissement de l'esclavage, c'est de la Martinique qu'ils vont organiser avec un succès important un monopole économique de la Guadeloupe.
    Février 1910 marque le début de luttes sociales profondes et de masse. Des ouvriers agricoles se mettent successivement en grève. Le 15 février une grève débute en Grande-Terre à l'usine de Darboussier. Après une répression qui aura fait 3 morts, les usiniers qui jusque là refusait la demande d'augmentation de prix de la tonne de canne qui leur était vendu donnent satisfaction aux ouvriers.

     

    1920.
    Guadeloupe grève 03.jpgDix ans plus tard, ce sera la conquête de la journée des huit heures. Le vendredi 16 juillet 1920, à l'usine de Darboussier une délégation de l'Union des Travailleurs présente trois points de revendication au directeur que sont : 1) La journée de huit heures ; 2) Le maintien des salaires de la récolte pendant l'intersaison ; 3) le non licenciement des grévistes. Le 31 juillet un accord signé entérinant les trois demandes des grévistes. Par la suite il s'étendra à la métallurgie.

     

    1925.
    En 1925 un autre conflit majeur apparaît. L'objet du conflit est la différence du prix de la tonne de canne à sucre entre usines. L'usine Duval rémunère 66,60 francs la tonne alors que l'usine Beauport payait 68,65 francs la tonne. Las de cette divergence les petits planteurs réclament une revalorisation de la tonne et une uniformisation des rémunérations. Le 3 février ils occupent les ils manifestent dans les usines. Des pourparlers s'engagent rapidement avec les usiniers. Elles achoppent sur une proposition de 70 francs. Durant les négociations des grévistes mobilisent d'autres planteurs restés dans les plantations. Les pourparlers achoppent. Les tensions s'exacerbent et une fusillade s'échangent entre grévistes et gendarmes venus protégés les usines sous ordre du gouverneur. Six manifestants sont tués et sept blessés. C'est la première grande répression d'un mouvement social depuis la fin de l'esclavage.  Les usiniers craignent que les petits planteurs aient des réactions extrêmes contre l'outil de production. De son côté les représentants de l'état redoutent une contagion sociale à l'ensemble des secteurs d'activités. Ces craintes poussent les usiniers au revirement. Ils acceptent de payer la tonne 73 francs, soit plus que ce que réclamaient les petits planteurs.
    Le mouvement de 1925 avec sa forte répression et l'obtention de la tonne à 73 francs inscrira le mouvement social dans une logique d'affrontement. Il fera considérer les patrons comme en perpétuel collusion avec l'Etat puisque celui-ci est capable de réprimer. Plus que sur les usiniers la méfiance touchera l'Etat. Certes l'image de celui-ci n'était déjà pas glorieux puisque l'abolition de l'esclavage venait d'avoir lieu soixante dix ans auparavant. Désormais, de manière justifiée ou pas, la classe populaire allait considérer l'Etat français comme un arbitre partiale qui n'hésite pas à tuer au profit de ceux qui détiennent les outils de production. Tous les ingrédients sont présents pour que les mouvements sociaux prennent le chemin de l'expression radicale.

     

    1930.
    La grève de 1925 reste dans tous les esprits. Ces enseignements sont présents dans tous les esprits lorsqu'en 1930 les usiniers proposent la tonne de canne à sucre 115 francs. De prime à bord cette proposition marque une forte augmentation en seulement cinq ans où elle était rémunérée 73 francs. Mais cette proposition restait inférieure à l'obligation légale. Un arrêté du gouverneur Tellier fixait le prix de la tonne à 126, 75 francs. L'arrêté prévoyait une augmentation des salaires des ouvriers agricole de 10% également. Le 13 février 1930 les ouvriers agricoles mènent une protestation. Des négociations sont menées en présence du Gouverneur entre grévistes et usiniers. Face à la demande des ouvriers d'une augmentation de salaire de 25 à 39% par rapport aux salaires de l'année précédente, les usiniers refusent et les négociations sont un échec. La réaction ouvrière est radicale. Différents sabotage sont dénoncés par les usiniers. L'inflexibilité des usiniers a eut raison des revendications ouvrières et le travail reprend. La grève de 1930 restera un échec dans l'histoire des revendications ouvrières guadeloupéenne. Elle fera toutefois réfléchir la classe ouvrière sur la nécessité d'être bien organisée et représentée lors des négociations avec les usiniers.

     

    Autour de 1946
    1946 correspond à la Départementalisation dont Aimé Césaire fut la tête de prou. Cette période est marqué par de nombreux troubles sociaux politiques après que de nombreux antillais rentrent de la seconde guerre mondiale avec un sentiment de non reconnaissance par la société française de leur engagement auprès du Général De Gaulle. Période de trouble sociaux, de questionnements politiques, mais surtout de demande de reconnaissance nationale de l'importance des Antilles. Césaire mettre en garde le gouvernement de l'époque sur les enjeux de cette attente. Indiscutablement il n'a pas été entendu.

     

    Continuons dans notre tour de sélection de grèves avec celle de 1952
    La grève de 1952 restera un évènement sanglant dans l'histoire sociale antillaise. La fin de l'année Guadeloupe Grève 04.jpg1951 est marquée par une revendication des ouvriers agricoles. Les ouvriers employés sur les surfaces des usiniers. S'ajoute une demande de revalorisation du prix de la tonne de canne. Le conflit lancé en novembre1951 dure déjà deux mois. L'année 1952 s'ouvre donc sur un climat social exécrable. Les ouvriers commencent à avoir des actions contre les outils de production et les usiniers demeurent fermes sur leur refus d'accéder aux revendications. Alors que l'épuisement semble gagner des ouvriers, en janvier 1952, les fonctionnaires réclament également une revalorisation des salaires. La grève du secteur agricole fait tache d'huile et un mouvement de grève général illimité est lancé. Durant un mois, la mobilisation est vive. Elle touche toutes les villes sucrières pour se propager à tous les activités de production. Face à l'extension le 11 février 1952 les CRS quadrillent plusieurs villes et se postent pour permettre l'accès aux usines. En réponse les ouvriers érigent un blocage et empêchent l'accès à l'Usine Gardel. Les forces de l'ordre vont intervenir pour démonter le barrage. Postés depuis trois jours, fatigués, les CRS font faire face à la résistance des manifestants. Des coups de feu sont tirés. Quatre manifestants décèdent et 14 sont tués. Devant cette répression les grévistes se découragent et l'ont retiendra de cette grève le caractère sanglant. Mais surtout elle encrera d'avantage les luttes sociales aux Antilles dans une confrontation violente.

    Grève de 1967. Beaucoup a été dit : passons donc.

    Le lundi 4 janvier 1971 l'Union des Travailleurs Agricoles, syndicat non représentatif dénonce un accord qui vient d'être signé entre la CGTG, la CFDT et le patronat en commission paritaire de l'industrie sucrière. Elle déclenche à Sainte-Rose le lundi 18 Janvier 1971 une grève pour exiger :

    1. La reconnaissance de sa représentativité
    2. L'augmentation à 27 francs de la journée de travail et la suppression des primes ;
    3. L'abrogation du mode de paiement de la canne à la richesse saccharine ;

    La jeunesse étudiante et lycéenne s'embrase littéralement. Un vaste mouvement de solidarité avec les travailleurs prend naissance.Autour de la grève et en même temps qu'elle, s'installe un débat de fond sur l'ensemble des problèmes que connait la société guadeloupéenne :
    Les autorités religieuses aussi vont se positionner par rapport à ce grand mouvement social. D'abord un prêtre engagé se manifeste au Lamentin en soutenant directement la grève de la canne : il s'agit du Père Chérubin CELESTE, à l'époque aumônier des Jeunesses Catholiques et animateur de la communauté chrétienne du secteur Baie-Mahault, Lamentin, Sainte-Rose.
    La grève va largement dépasser les frontières de la Guadeloupe. C'est en Martinique qu'un vaste mouvement de soutien s'organise à l'initiative des organisations politiques patriotiques et du PPM. Dans ce camp là, seul le PCM ne se manifestera pas.
    Les Organisations Syndicales Traditionnelles sortiront considérablement affaiblies de la grève de 1971, la contestation s'installant dans leur base et au sein même de leur direction.
    C'est également à cette époque que l'UTA mit en place dans des communes où elle était implantée, une "Ecole du Soir" afin d'alphabétiser les travailleurs agricoles et les initier à certaines disciplines scientifiques (Mathématiques - Sciences de la Nature - Economie Politique...).
    Avec l'arrivée de l'UTA et à travers la grève de 1971 naissait un syndicalisme guadeloupéen de type nouveau. Si on se réfère au discours des syndicalistes il s'agit, je site « d'un syndicalisme où les masses devenaient enfin maîtresses de leur destin en prenant les rênes de la base au sommet, en élaborant un discours en phase totale avec les réalités sociales et culturelles du pays et en développant des formes d'actions dont elles avaient elles-mêmes la maîtrise ». Ce que ne disent pas les leaders syndicaux c'est qu'il s'agissait d'un syndicalisme populiste, nationaliste.
    En dépit de l'importance du mouvement de masse et de la durée de la grève de 1971 - plus de 3 mois - les principales revendications économiques des travailleurs de la canne n'ont pas été satisfaites.

     

    1975
    A l'instar de celle de 1971, la grève de 1975 sera déclenchée à la suite de la signature d'un accord de trahison des intérêts des ouvriers industriels et agricoles par la CGTG et la CFDT avec les usiniers.
    Mais contrairement à celle de 1971, la grève de 1975 n'est pas intervenue comme une révolte populaire canalisée ; elle a été longuement et minutieusement préparée : durant tout l'hivernage 1974, l'UTA-UPG a organisé la séquestration tour à tour de tous les directeurs d'usine. Il s'agissait pour l'UTA-UPG d'une part d'obtenir pour les planteurs une ristourne sur les cannes vendues en 1974 et, d'autre part de faire admettre la présence de l'UPG au sein de la Commission Interprofessionnelle de la Canne et du Sucre. Face à l'inertie des négociations, une délégation composée de deux planteurs (Sostène GENDREY & Rosan MOUNIEN), de deux usiniers (Amédée HUYGUES-DESPOINTES & GARON) et d'un fonctionnaire de l'agriculture COURBOIS) fût envoyée à Paris en Janvier 1975. De conciliabules en négociations, personne ne voulût prendre de décision ni répondre clairement au problème posé à savoir : La fixation du prix de la tonne de canne en Guadeloupe en fonction de son coût moyen de production. Une seule décision fût prise : celle d'envoyer un expert du Ministère de l'Agriculture, l'ingénieur général René SAUGER.
    La venue de R. SAUGER en Guadeloupe au courant de la 3eme semaine de Janvier 1975 ne changea en rien les données du problème même si techniquement le dossier avança ; c'est d'ailleurs au cours d'une négociation avec SAUGER à la Sous-Préfecture que le clash se produisit entre l'UPG et les usiniers qui refusaient même les propositions timides de SAUGER en leur faveur. CELA NE VA PAS SANS RAPPELER LA DERNIERE GREVE AVEC LA VENUE DE JEGOT ET PAR LA SUITE DES NEGOCIATEURS.

    Face aux tergiversations de l'Administration, à l'intransigeance et à l'arrogance des usiniers et à la capitulation des autres syndicats, l'UTA-UPG et l'UGTG prirent seules leurs responsabilités et déclenchèrent début février 1975 une grève générale illimitée dans l'industrie sucrière.
    Pendant un mois et demi, la grève sera totale dans les champs y compris chez les planeurs ; et sera largement suivie dans les usines qui de toute façon ne pouvaient fonctionner sans canne. Ni les usiniers, ni l'administration en dépit des apports répétés des grévistes ne se sentirent obligés d'ouvrir les négociations. Loin s'en fallut...
    Nous assistons alors à une sorte de répétition de l'histoire. Des moyens policiers considérables furent mis à la disposition des usiniers : des barrages policiers interdisent aux grévistes l'accès aux habitations sucrières. Les dirigeants de l'UTA-UPG décidèrent avec les travailleurs au cours d'une réunion tenue le 21 mars 1975 de reprendre le travail dès le lundi suivant. Un communiqué fut même publié à cet effet.
    C'est alors que le samedi 22 mars 1975 survint un évènement extraordinaire... Là suite lors de la prochaine note. Remarquez que la religion fait son apparition. Nous revenons tout doucement à nos premiers amours.

  • Grèves aux Antilles, identité et religion. Acte 1

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    LKP 01.jpgLes sollicitations pour commenter le mouvement social aux Antilles furent très nombreuses. Je n'ai accepté aucune pour différentes raisons durant le mouvement social.
    Premièrement il y a des chercheurs plus informés que moi sur la question. Deuxièmement, si je m'intéresse aux Antilles, je n'ai pas directement observé le mouvement social en Guadeloupe (puisque c'est principalement de ce Département qu'il est question). Troisièmement, je m'intéresse aux Antilles avant tout au travers de la question des valeurs et croyances religieuses. Ce regard a besoin de s'extirper de l'actualité pour être pertinent.

    Bien que le climat social antillais soit encore très tendu, on peut dans un climat plus serein poser la question de la place du religieux dans ce mouvement social. Cela peut se faire de deux manières. Quel est le discours du religieux chez les leaders de la protestation ? Personnellement je ne peux pas répondre à cette question. Plus intéressant pour moi est la traditionnelle problématique de la place du religieux. En d'autres termes, que démontre la place du religieux dans la société antillaise, en relation avec l'image que traduit le dernier mouvement social sur cette dite société ? Pour faire plus simple, si on prend en compte la place du religieux dans la société antillaise, l'image, l'impression d'une société en désespérance tient-elle ? Bref, comment mieux rendre compte de l'identité antillaise quand on prend en compte le mouvement social et le religieux. Vaste programme. Ben... entamons-le. Je tiens déjà à vous dire qu'il sera l'objet de mon prochain livre en cours de finalisation (et de tractation avec l'éditeur).
    LKP Besancenneau.jpgAprès la signature des accords, j'ai donné qu'une seule conférence sur la question. Celle-ci a en partie commencé à répondre. Je reviens partiellement sur ce que j'y ai développé. Elle s'est déroulée à Lille, au siège de la Fédération du Parti Socialiste, à l'invitation de Gilles Pargneaux tête de liste socialiste à la députation européenne. Notez que j'aurai fait de même dans n'importe qu'elle autre formation politique même d'extrême droite, dès lors que je peux m'exprimer à ma guise et en sécurité. Ceux qui me connaissent savent d'ailleurs que je préfère allez dans des terres hostiles quand il s'agit de parler des Antilles.
    Revenons à la conférence qui s'est déroulée au PS. J'ai accepté d'y être parce que la grève générale était achevée et surtout parce qu'il est impossible de dire non à Virginie Tchoffo, responsable de la relation Nord Sud au sein du PS Nord. Mais surtout Virginie m'a garanti une liberté de ton et d'expression. Elle a même fait venir de la Guadeloupe, le Premier Vice Président du Conseil Général, Monsieur Félix Desplan (oui nous sommes parents et proches), Maire de la Ville de Pointe Noire et responsable de différents organismes et institutions.
    Le thème de la rencontre était La place des Dom dans la République. Le mouvement social de 44 jours qui vient de se terminer dans son aspect général permet de reposer avec acuité la question. Celui-ci ne peut se comprendre qu'en rappelant que les Antilles sont avant tout des sociétés post-esclavagistes, mais dont le tissus économique et sociale rester déterminés par l'héritage de l'esclavage. Je ne vais pas directement parler de l'évident impact des ravages de l'esclavage sur la société antillaise et sur sa manière de protester contre le pouvoir central lorsqu'elle pense que ce dernier a un rôle, voire une responsabilité dans des dysfonctionnements sociaux. Entant que sociologue je me permettrai d'insister sur quelques points dans l'ambition de mieux comprendre la dernière grève générale. En quoi cette grève réinterroge la vision et le rapport que les antillais ont avec leur société ? Qu'enseigne également la perception de ce mouvement social par l'opinion publique hexagonale tel que les médias la traduise ? Que révèle aussi le traitement médiatique de ce mouvement social ? Et plus pertinent, ici, que dire du traitement politique aujourd'hui des DOM ? Je ne vais pas délier ces questions. Pour notre blog ce n'est qu'une partie de notre réflexion. A la différence de ce qui était dit en Conférence, nous rajouterons la dimension religieuse. Mais une chose à la fois.
    Pour commencer il faut rappeler deux éléments fondamentaux indispensables pour avancer. Le premier est que le mouvement social est un acte fondateur de l'antillanité. Le second, qui découle du premier, est la permanence d'une tension forte, paradoxale, entre la France et les Antilles. Ces deux points sont essentiels car plus que la dernière grève ils permettent de comprendre souvent (pas toujours) les représentations des antillais et certaines attitudes. Personnellement je le revois dans les églises adventistes.

    • - Les mouvements sociaux: un acte fondateur des Antilles

    En préambule il convient de noter quelque chose que nous n'avons pas le temps de faire maintenant. Toute l'identité antillaise est marquée par l'héritage de l'esclavage. Les interactions entre hommes et femmes, la logique entrepreneuriale, le rapport à l'autorité politique, la vision de l'avenir, et j'en passe, ne peuvent être compris sans faire un détour par l'histoire esclavagiste. Nous ne le ferrons pas mais il est important d'indiquer l'omniprésence de ce thème qui est le tableau de fond, le soubassement, le terreau invisible aux conséquences permanentes et concrètes qui forment l'identité antillaise, et plus la société antillaise.
    Ce rappel fait, répondons à l'ensemble portées par le thème de notre rencontre. L'actualité a zoomé sur les Antilles et au mieux sur le mouvement social de 1967 qu'a connu la Guadeloupe. Mais ce regard est très partiel voir parcialiste. Il permettait de considérer les mouvements sociaux antillais et plus particulièrement guadeloupéens comme des prémices aux mouvements sociaux antillais. Le déplacement d'Oliver Besancenot porta certainement ce souhait. Permettez-moi de signaler qu'il s'agit là d'une vision instrumentale des Antilles. Les Antilles ne sont pas l'anti-chambre de la France. Ce n'est pas prendre en compte toute la complexité du mouvement social antillais avec ses particularités. Et puis, avec quelle éthique penser qu'un groupe peut être l'espace d'expérimentation, des rats de laboratoires de luttes pour d'autres. Il y a pour moi que des anomalies éthiques à cela. Je ne crois que le peuple antillais soit le brouillon d'une œuvre social qui se déroulera en France. Ceux-ci le différencient des conflits sociaux français.
    Cette manière de considérer le conflit social comme d'une pré-révolution oubliait ou nie un fait central de l'antillanité : les Antilles sont nées du conflit social. L'abolition de l'esclavage fut en grande partie due aux grèves de zèles des esclaves, aux incendies dans les plantations, aux marronnages d'esclaves, aux insurrections, aux meurtres de maîtres, brefs des conflits sociaux qui ont rendu non viable l'économie esclavagiste et a obligé les mouvements philosophiques, politiques, a reconsidérer l'exploitation du nègre et a promulguer sur le papier la fin de l'esclavage. La protestation sociale est donc un acte constitutif de l'identité antillaise. Mais attention n'en déduisons pas que les Antilles sont des terres permanente du conflit social. Nous disons simplement que le contexte historique qu'était l'esclavage a obligé des individus à protester socialement pour acquérir officiellement le statut d'être humain et mettre en déroute l'industrialisation d'humains par d'autres humains. Notons pour ce qui est des Antilles que le rapport de force a surtout été très important en Guadeloupe où les troupes napoléoniennes ont matés dans le sang différents soulèvements. Le plus célèbre marquera la mort d'Ignace et Delgrès en Basse-Terre. La cruauté alla jusqu'au meurtre de la Mulâtresse Solitude, cette femme révolutionnaire, primipare si je ne me trompe pas (à vérifier), qu'on laissa accoucher et que l'on tua après la naissance de sa progéniture. De tel faits et méfaits marquent l'inconscient collectif. Ils tissent un pattern. Ils modèlent un mode de communication qui devient le cadre d'échange permanent entre ceux qui se sentent porteurs de la mémoire de la souffrance subits et ceux qui sont représentés comme responsables d'une non prises en compte de cette souffrance. Ceci permet d'introduire le second point.

    • - L'établissement d'un rapport conflictuel avec la France

    LKP 02.jpgUn deuxième rappel est nécessaire. Je mettrai l'accent sur la Guadeloupe puisque ce fut l'épicentre et le point de départ des mouvements sociaux. Ce zoom se justifie par le fait que la Guadeloupe, certainement marquée par les meurtres napoléoniens a développé une résistance physique plus grande que la Martinique. Rappelons que pour effrayer les esclaves de la Martinique et rassurer les colons, Bonaparte envoie le Général Richepance en personne reprendre la Guadeloupe qui était passée sous domination anglaise. C'est d'ailleurs lui qui organisera la tuerie de Delgrès. Il mettra la guillotine sur les places et fera couler le sang. Avant, profitant de la domination anglaise l'abolition de l'esclavage avait été prononcée en Guadeloupe et pas en Martinique restée sous domination française. C'est sous domination anglaise que l'Île eut un important essor économique. Le port de Pointe-à-Pitre fut durant cette période fondée. Sous domination française la Guadeloupe dépendait administrativement de la Martinique et ne bénéficiaient pas d'infrastructures pour un développement déconnectée de la plantation. C'est sous la domination anglaise que le Port du Moule conçue pour la réception des négriers perdue de son prestige au profit du nouveau port de Pointe-à-Pitre. Ce dernier était conçu pour le transport des marchandises manufacturées.
    Avec l'arrivée de Richepance c'est donc le développement de la terreur au détriment du développement économique. Ce dernier s'établi dans la construction d'une dépendance économique vis-à-vis de l'hexagone. Richepance veilla à ce que la Guadeloupe eut le moins d'autonomie possible de façon à enlever toute capacité de soulèvement, quitte à ce que l'Île n'ait pas de développement et d'autonomie économique. Je dis cela en clin d'œil déjà à l'idée selon laquelle les Antilles dépendent volontairement, sur le plan économique, de la France. En 1802 deux ans avant qu'Haïti premier Etat nègre indépendant dans une guerre contre la France, Napoléon foulait les valeurs des lumières aux Antilles pour fabriquer des sous hommes dans la Caraïbe. Je profite de l'occasion pour dire qu'ici, on ne peut pas reprocher aux nègres de ne pas voir en Napoléon l'immense être humain qu'un Max Gallo et tant d'autres proclament. Dans son livre le Crime de Napoléon, Claude Ribbe développe d'ailleurs, magistralement les tueries et autres crimes dont l'Empereur fut coupable envers les nègres. Notez que l'Homme du Code civil qu'était Napoléon fut aussi l'Homme du Code Noir. Il s'empressa de rétablir ce dernier en 1802 après son coup d'Etat. Cela dénote que d'un côté on reconnait et réglemente les droits et devoirs qu'auraient certains hommes, tout en refusant à d'autres, nègres, esclaves, les mêmes droits. Cette logique perdurera et perdure encore quad il s'agit du monde nègre et en particulier l'Outre-mer dans la République.
    Le rapport de la France à ses colonies de la Caraïbe se construit très tôt dans un contexte de tensions où les colonisés ont le sentiment d'être déconsidérés. L'histoire de la lutte sociale antillaise va renforcer ce sentiment. La dernière grève avec le départ du secrétaire d'Etat à l'Outre-mer et les revirements de ce dernier, ne sont pas là pour faire changer les choses. Surtout elle s'inscrit dans un schéma déjà écrit par l'histoire et duquel on ne semble pas s'en sortir. Voyons autour d'exemples fort ce schéma dont les deux éléments sont le conflit et la méfiance.
    Cette histoire démontrera que la dernière grève, contrairement à ce qui est dit, n'a pas d'aspect particulier, mais s'inscrit dans une continuité des rapports sociaux. Cependant reconnaissons une intensité plus forte que précédemment. Si une continuité existe, il faut donc se poser la question de la pertinence du vocabulaire de « Crise » qui est pris en permanence et surtout de « Crise identitaire / Crise sociétale (Y. Jégo, Secrétaire d'Etat à l'Outre Mer). Tout cela nous en reparlerons paisiblement dans la prochaine note... Ne vous inquiétez pas, nous glissons doucement vers la place du religieux.