Je m'étais engagé auprès de vous à revenir sur la question de l'adhésion de l'Eglise adventiste à la FPF. J'aimerai dans les mois qui suivent vous proposer une lecture en terme de "reconnaissance mutuelle". Pour cela j'attends que se réalise une journée d'Etudes sur la question, qui est en cours d'organisation avec différents spécialistes. Après les vacances je serai en mesure de vous en dire plus. Pour l'instant, Charles, lecteur habituel de ce blog, membre de l'Eglise Adventiste, indique, l'interview suivante de JP Barquon, nous deveçant sur ce thème de la "reconnaissance mutuelle". Cette dernière, donnée au Magazine Aleloo, explicite dans un langage pédagogique, court et simple (format évidemment contraingnant de ce genre d'exercice) l'adhésion adventiste à la FPF. En attendant que je vous propose une vision qui sera complémentaire à celle-ci, de mon avis, cette interview demeure pédagogique.Au passage notez l'évolution des chiffres de l'adventisme surtout dans les DOM/TOM et la place d'Ellen Whote dans la présentation que fait Aleloo de l'adventisme.
INERVIEW EXTRAT DE ALELOO MAGAZINE
Adventisme et protestantisme : une reconnaissance mutuelle.
Le 11 mars dernier, l’Union des fédérations adventistes de France (UFA), a été admise au sein de la FPF, après deux ans de probation. Critiqués par certains chrétiens évangéliques, en raison de leur attachement au sabbat et surtout aux écrits de la prophétesse Ellen White, les adventistes du 7ème jour sont désormais officiellement membres de la grande famille protestante - en France et dans plusieurs autres pays. Le pasteur Jean-Paul Barquon est secrétaire général et responsable du département des communications de l’UFA. Il estime que cette adhésion répond à la reconnaissance par les adventistes de leurs racines protestantes.
Une Eglise évangélique un peu particulière
L’adventisme, a été organisé en dénomination aux Etats-Unis en 1863. Il est né dans les années 1840 d’un mouvement de réveil interconfessionnel annonçant le retour imminent du Christ. Il est présent en France depuis 1874 (l'Eglise adventiste du septième jour a été officiellement organisée en association cultuelle le 26 janvier 1918). A l'heure actuelle, il y a 11 000 adventistes en France métropolitaine (33 000 dans les Dom/TOM) et 13 500 000 dans le monde (membres adultes baptisés). Ces chiffres n'incluent pas les nombreux enfants et sympathisants. Les croyances fondamentales des adventistes sont les mêmes que celles des évangéliques : justification par la foi seule, salut par grâce, pleine autorité des Ecritures (sola scriptura), etc. Certaines croyances « particulières », telles que l’observance du sabbat/samedi ou la non-immortalité de l’âme, sont en fait héritées d’autres mouvements protestants. Quant à l’autorité des écrits d’Ellen White, l’une des pionnières de l’adventisme, elle n’est pas placée sur le même plan que celle de la Bible.
Aleloo.- L’Union des Eglises adventistes de France vient d’adhérer à la Fédération protestante de France : quelles ont été les motivations de cette adhésion ?
Jean Paul Barquon.- En adhérant à la FPF, l’Union des Fédérations adventistes de France (UFA) n’adhère pas à une Eglise protestante. D’une part la FPF n’est pas une Eglise : c’est une association loi 1901 qui rassemble une variété d’églises issues de la Réforme protestante, mais aussi de différents mouvements de réveil. Elle rassemble également des IOM (Institutions, œuvres et mouvements). D’autre part, il n’existe pas une église protestante mais des églises protestantes : une famille issue de deux grands courants historiques (luthériens et calvinistes-réformés) mais encore des libristes, des baptistes, des évangéliques, des pentecôtistes et des charismatiques. Cette diversité est une richesse. Depuis la séparation de l’Eglise et de l’Etat de 1905, il était inévitable que tôt ou tard l’Eglise adventiste du septième jour se retrouve dans ce panel. Se démarquer du phénomène sectaire peut entrer en considération mais ce n’est pas une motivation essentielle, car ce serait superficiel et bien incomplet. La motivation principale est simple : reconnaître nos racines protestantes, considérer les autres églises comme des partenaires et non pas comme des adversaires.
A.- Comment s’est effectué le processus d’adhésion et comment cette adhésion a-t-elle été reçue par les Eglises adventistes ?
J.P. B.- L’Eglise adventiste a été invitée dès 1905 à devenir membre de la Fédération protestante, puis en 1946 la demande fut renouvelée par le président de la FPF, le pasteur Marc Boegner. Ce n’est pas une nouveauté. Mais le président de l’unique Fédération adventiste de l’époque se tournant vers ses responsables hiérarchiques pour obtenir un conseil à ce sujet, n’a pas été encouragé à aller dans cette direction. Les mentalités évoluent. Les pasteurs adventistes ont une solide formation théologique universitaire et se considèrent comme de véritables protestants. Au sein d’un même pays comme la France, en raison du brassage de la population, nous trouvons au sein de nos églises, une pluralité culturelle et une grande diversité ethnique. Il est possible de trouver des membres dans nos églises qui regardent les autres dénominations religieuses au sein du protestantisme comme des concurrentes, voire des adversaires à l’implantation du message adventiste. Or, nous devons apprendre à respecter les autres. La décision au sein de l’Eglise adventiste de France ne s’est pas faite d’un coup de baguette magique. Elle émane dans un premier temps de la résolution de plusieurs assemblées générales de l’Union franco-belge, de 1991, de 1993 puis de la consultation du corps pastoral, de comités des deux fédérations adventistes de France, d’une rencontre spéciale à Lyon en novembre 1995, de visites dans les églises et d’une assemblée générale de l’Union du 8 février 2003, avec le vote favorable de la majorité des délégués (86 pour et 18 contre). Ces différentes consultations, et votes ont permis de déposer définitivement notre candidature à la FPF. Entre temps depuis 1993, il y a eu la naissance d’une commission paritaire émanant du Conseil de la FPF qui a entrepris un dialogue régulier sur l’examen de toutes les croyances de l’Eglise adventiste. Puis le dialogue s’est instauré au niveau local dans les différentes régions avec les pastorales, pour aboutir à deux années de probation à compter de 2003. Le 11 mars 2006, lors de l’assemblée générale de la FPF, au même titre que les quatre églises évangéliques de type pentecôtiste en demande, l’UFA est devenue membre de la Fédération protestante de France avec sur 68 délégués votants, 63 voix favorables, 2 abstentions et 3 non.
A.- A-t-elle dû faire des concessions sur le plan théologique ou éthique pour y parvenir ? Est-elle plus ou au contraire moins « évangélique » à présent ?
J.P.B.- Pourquoi faire des concessions sous prétexte d’adhésion ? Si l’on n’avait pas été capable de nous prendre tels que nous étions, nous n’aurions pas accepté de devenir membres de la FPF. La FPF n’est pas une Eglise et elle ne demande pas à ses membres d’aligner leurs confessions sur un modèle présenté comme un étalon avec une profession de foi commune à tous. La Charte de la FPF précise clairement dans son préambule que « chaque Eglise membre de la FPF conserve les formulations de la foi, les expressions cultuelles, les formes de présence dans la société et les priorités du témoignage auxquelles elle est attachée. » Notre adhésion ne nous a pas rendus plus ou moins évangéliques qu’avant. Tout chrétien qui croit en Jésus-Christ et passe par une nouvelle naissance en vivant dans la grâce, ne peut être qu’évangélique. Nous n’avons pas besoin, en tant qu’adventistes, d’une adhésion pour devenir évangéliques. Là encore les préjugés sont parfois tenaces, à notre égard, au sein du courant évangélique français, notamment en raison de trois aspects : le regard que nous portons sur Ellen White, puisque nous acceptons les dons spirituels, le maintien du culte le sabbat et notre attachement à certains principes de santé . Mais ni le don de prophétie, ni la pratique du sabbat, ni l’adhésion à des principes de santé ne sont des conditions de salut. Certains évangéliques pensent que nous avons remplacé les écrits bibliques par ceux d’Ellen White. Si c’était le cas, ce serait de la pure hérésie. La Conférence générale des adventistes s’est exprimée sur cela depuis bien longtemps et l’a rappelé par une déclaration en juin 1982. Lors du dialogue entrepris avec la Fédération luthérienne mondiale, de 1994 à 1998, cet aspect a été largement abordé, sans complexe. Les adventistes considèrent les écrits bibliques comme l’autorité normative sans aucune réserve (norma normans). Mais les luthériens comme les adventistes attribuent une autorité à d’autres documents considérés comme norme dérivée (norma normata). L’autorité d’Ellen White est une autorité dérivée. Elle a fermement souscrit au principe du sola scriptura et les adventistes testent ses écrits d’après l’Ecriture, d’où l’existence du centre de recherche WhiteEstate.
A.- Qu’attendez-vous de cette adhésion ? Que va-t-elle apporter à l’Eglise adventiste de France ? Que vont apporter les adventistes aux autres Eglises membres ?
J.P.B.- J’attends de cette adhésion ce que toutes les Unions ou fédérations membres de la FPF sont en droit d’attendre conformément à la Charte : un témoignage commun de l’Evangile, une complémentarité des dons et des compétences, une interpellation réciproque, une parole commune sur des problèmes éthiques à transmettre à nos contemporains, etc. Mais j’attends surtout l’existence d’une commission théologique, voire d’un colloque sur des thèmes précis, pour montrer enfin que nos particularités, comme la célébration du culte le sabbat à notre niveau, ne sont pas une fantaisie. La société biblique française, avec l’Alliance biblique, a profité depuis longtemps de la présence d’exégètes adventistes, qui ont contribué, par exemple, à la traduction de la Nouvelle Bible Segond. Les protestants « historiques » ne se sont jamais plaints de la contribution des adventistes au CPCV (Comité protestant des centres de vacances), aux émissions du service télévisé protestant de France 2, aux émissions de radio ou même des accords de la Faculté de théologie protestante de Strasbourg avec la Faculté adventiste de Collonges-sous-Salève.
A.- Peut-on envisager de voir un jour l’Eglise adventiste membre d’une fédération évangélique telle que la FEF ?
J.P. B.- Ce n’est pas à l’ordre du jour. La FPF a une dimension différente de celle de la FEF. La FPF existe depuis 1905, alors que la création de la FEF est beaucoup plus récente. La FEF est nécessaire puisque les Eglises évangéliques sont souvent de type congrégationaliste et ne sont pas forcément organisées et structurées. D’une manière générale, nous nous sentons proches des chrétiens évangéliques, au niveau du vécu et du dynamisme. Mais aussi nous nous sentons proches des églises protestantes historiques au niveau de la formation théologique du corps pastoral. Ceci dit, je crois qu’il est nécessaire que l’UFA entreprenne un dialogue avec l’AEF (Alliance évangélique française) et avec la FEF pour éviter les malentendus et les préjugés, mais pas en vue d’une adhésion.
Source: Aleloo Magazine